Non seulement les États-Unis ont contribué à créer les conditions permettant aux Khmers rouges d’accéder au pouvoir au Cambodge en 1975, mais ils ont également soutenu activement cette force génocidaire, tant sur le plan politique que financier. Dès janvier 1980, les États-Unis finançaient secrètement les forces exilées de Pol Pot à la frontière thaïlandaise. L’ampleur de ce soutien – 85 millions de dollars entre 1980 et 1986 – a été révélée six ans plus tard dans une correspondance entre Jonathan Winer, avocat du Congrès et alors conseiller du sénateur John Kerry (Démocrate-Massachusetts) de la commission des affaires étrangères du Sénat, et la Vietnam Veterans of America Foundation. Winer a déclaré que ces informations provenaient du Congressional Research Service (CRS). Lorsque des copies de sa lettre ont été diffusées, l’administration Reagan était furieuse. Puis, sans expliquer clairement pourquoi, Winer a réfuté ces chiffres, sans toutefois contester qu’ils provenaient du CRS. Dans une deuxième lettre adressée à Noam Chomsky, Winer a toutefois réitéré l’accusation initiale, qu’il m’a confirmée, la déclarant « absolument correcte ».
Source : The World Traveler, John Pilger (1939-2023)
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
Washington a également soutenu les Khmers rouges par l’intermédiaire des Nations unies, lesquelles ont fourni à Pol Pot le moyen de revenir au pouvoir. Bien que le gouvernement khmer rouge ait cessé d’exister en janvier 1979, chassé par l’armée vietnamienne, ses représentants ont continué à occuper le siège du Cambodge à l’ONU. Ce droit a été défendu et encouragé par Washington qui y voyait un prolongement de la Guerre froide, un moyen pour les États-Unis de se venger du Vietnam et un élément de sa nouvelle alliance avec la Chine (principal bailleur de fonds de Pol Pot et ennemi de longue date du Vietnam). En 1981, le conseiller à la Sécurité nationale du président Carter, Zbigniew Brzezinski, a déclaré : « J’ai encouragé les Chinois à soutenir Pol Pot. » Il a ajouté que les États-Unis avaient « fermé les yeux » lorsque la Chine avait envoyé des armes aux Khmers rouges via la Thaïlande.
