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dimanche 2 novembre 2025

Allégories de l’antifascisme : Orson Welles et le front culturel


Dans ce texte, Michael Denning revient sur ce qu’il propose d’appeler le « front culturel » qui émergea aux États-Unis lors de la grande dépression. Pour l’auteur, cette période d’intense activité cinématographique, musicale, théâtrale et radiophonique est irréductible à un processus de marchandisation de la culture ou au développement d’une « industrie culturelle » aliénante. Elle marque la constitution d’un bloc historique antiraciste et internationaliste au sein duquel se croisent Orson Welles, C. L. R. James, Duke Ellington ainsi que les innombrables figures anonymes des classes subalternes qui surgissent alors sur la scène esthétique et politique. Revenant plus particulièrement sur le parcours d’Orson Welles, Denning nous rappelle que les media de masse et les moyens de production culturels peuvent être retournés contre la société marchande et ses fantasmagories.

Les liens d’Orson Welles avec Henry Luce et Archibald MacLeish ((Luce fut l’un des plus grands patrons de presse de l’histoire, à la tête de grands magazines pionniers comme Time, Life, Fortune ; MacLeish était un poète et écrivain, proche du Pdt. Roosevelt qui le nomma à la tête de la Bibliothèque du Congrès(NDT).)) étaient, pour les intellectuelles et intellectuels new-yorkais réunis autour des revues Partisan Review, Politics, et Dissent, des symptômes de la démarche de vulgarisation (middlebrow) qui caractérisait le Front Populaire ((Le terme de « Front Populaire » peut surprendre, appliqué ainsi au contexte des États-Unis. Mais plutôt que de l’employer dans un sens très strict, et de présenter la gauche radicale comme un phénomène exclusivement centré sur le parti communiste et à l’influence limitée sur la société et la culture des États-Unis, au gré des (dés)illusions de quelques compagnons de route, Michael Denning désigne ainsi un véritable « bloc historique », unissant les nouveaux mouvements syndicaux et sociaux, diverses structures politiques, et un grand nombre de formations culturelles différenciées. Le « Front culturel » qui donne son titre au livre est donc l’ensemble de ces formations culturelles, auxquelles l’ouvrage fait la part belle (de la littérature aux arts du spectacle anciens et modernes, jusqu’à la théorie socialiste), sans jamais cesser de lier les œuvres, les structures de production et les conflits sociaux, dans la meilleure tradition des cultural studies. Michael Denning affirme donc que la dynamique de Front populaire aux États-Unis a été sous-estimée, sur le plan politique comme sur le plan culturel (NDT).)). Ils mettaient dans le même sac les apparitions de Welles dans les magazines Time ou Life, ses engagements antifascistes, ses adaptations de romans à succès (et à l’intrigue grossière) de Booth Tarkington, ses tentatives de remettre au goût du jour des classiques victoriens tels que L’Île au trésor ou Dracula pour la radio de haute culture (highbrow), et ses transpositions contemporaines de Shakespeare. « M. Welles, à en juger par ses mises en scène de Macbeth, Faust, et Jules César, considère qu’une pièce élisabéthaine est un handicap, qui ne peut être transformé en avantage qu’à grand renfort d’artifices spectaculaires, de coupes, de falsifications, et de modernisation », écrivait ainsi Mary McCarthy dans Partisan Review. « La méthode de M. Welles est de chercher une recette moderne dans laquelle faire entrer un classique d’une façon ou d’une autre. Dans le cas de Macbeth, il s’agissait de The Emperor Jones ((Pièce qui lança la carrière de Eugene O’Neill, en 1920, et dont le protagoniste est un prisonnier afro-américain qui parvient à s’évader, gagne une île des Caraïbes et en devient l’empereur pour un temps (NDT).)) ; pour Faust, c’est guignol (Punch and Judy) ; pour Jules César, la pièce de théâtre prolétarien. » Pour McCarthy et les critiques de Partisan, le Mercury Theatre n’était pas un véritable projet expérimental d’art radical ou d’avant-garde, loin de là : au même titre que le front culturel de façon générale, il prenait un prétexte politique pour promouvoir le goût du kitsch, une vulgaire parodie de l’expérience esthétique ((Mary McCarthy, « February 1938 : Elizabethan Revivals », dans son ouvrage Sights and Spectacles, 1937-1956, New York ; Farrar, Straus and Cudahy, 1956, p. 17.)).

 ARTICLE EN INTEGRALITE

mardi 26 août 2025

Guy Debord: "Deux notes inédites sur l'architecture" (1959)

 SOURCE: Guy Debord, Œuvres, Quarto Gallimard, 2006, p. 497.

Réflexions sur l'architecture

Amsterdam 29 mai-2 juin 59 

1

Le problème de l'architecture n'est pas d'être vu du dehors, ni de vivre dedans. Il est dans le rapport dialectique intérieur-extérieur, à l'échelle de l'urbanisme (maison-rues) et à l'échelle de la maison (intérieur-extérieur).

2

Toutes les façades de la maison déterminent un "espace clair" dont la fonction est de jouer sur la contradiction ouverture-fermeture.

3

Construire toute une ville pour y faire l'amour à une seule fille, quelques jours.

4

La notion de "chambre de rue" (H.O.) renverse la fausse distinction des ambiances ouvertes et fermées. L'ambiance fermée elle-même s'ouvre sur l'ambiance ouverte (que des ambiances fermées délimitent).

Har Oudejans, un des deux architectes hollandais – l'autre étant Anton Alberts – qui avaient rejoint l'I.S. en mars 1959 (un an plus tard, ils furent exclus pour avoir accepté de construire une église à Volendam). 

 

Sur le complexe architectural

Cf. Ors. L'attitude baroque (= contradiction) par excellence c'est vouloir à la fois suivre la procession et la regarder passer (être dans la maison et la voir – depuis une maison annexe).

Eugeno d'Ors, Du Baroque.