Nous
(l’Occident) avons manqué le moment où le monde a cessé d’être tel que
nous le connaissions. Convaincus que « la fin de l’histoire » était
arrivée, que notre modèle avait triomphé, nous pensions que le reste du
monde dériverait lentement mais sûrement vers la démocratie libérale et
l’économie de marché. Nous imaginions que les grands combats de notre
époque se joueraient sur le terrain des esprits, des « likes » et des
parts de marché d’applications mobiles.
Pendant
que nous dormions, un nouveau monde se construisait. Pas seulement en
Chine ou en Russie. Tout un bloc de pays, aujourd’hui regroupé sous
l’appellation BRICS+, qui représente désormais plus de la moitié de la
population mondiale — près de 5 milliards d’habitants sur 8 —, a
commencé à façonner sa propre réalité. Il ne s’agit pas simplement d’une
alliance économique. C’est un projet civilisationnel en train de
s’émanciper de l’Occident, en créant ses propres instruments financiers,
ses propres corridors commerciaux et, surtout, sa propre vision de
l’avenir — une vision qui ne repose pas sur nos règles.
Alors
que nous nous mesurions à coups de diagonales d’iPhone et de
valorisations de start-up, de l’autre côté de la planète, on bâtissait
ce monde nouveau. Un monde fondé non pas sur des idées abstraites, mais
sur la physique. Un monde qu’on peut toucher, peser, dont on peut
mesurer la masse et le potentiel énergétique.
Pour
comprendre ce qui s’est produit, il faut décomposer la réalité en trois
niveaux fondamentaux, comme dans un jeu vidéo : Matière, Énergie et
Pensée. Et sur chacun de ces plans, nous avons perdu l’initiative
stratégique.
Le prix des biens bon marché : comment nous avons cédé le fondement du monde
Commençons
par le fondement. Par ce dont est fait notre monde : acier, béton,
plastique, cuivre, lithium, terres rares. Nous, en Occident, avons
volontairement abandonné ce niveau. Nous l’avons appelé « optimisation
des chaînes de production » et « délocalisation vers des pays à
main-d’œuvre bon marché ». Nous nous réjouissions des produits à bas
coût et de l’essor du secteur des services, tandis que la Chine devenait
l’usine du monde. Mais ce n’était que la première phase.
Aujourd’hui, la Chine ne contrôle pas seulement la fabrication. Elle maîtrise toute la chaîne de la Matière.
1.
Ressources : La Chine détient une position quasi monopolistique sur le
marché des terres rares, indispensables à toute l’électronique moderne —
des smartphones aux systèmes de guidage de missiles. Elle ne se
contente pas de les extraire ; elle contrôle aussi les technologies de
leur transformation.
2.
Production : Des jouets et des vêtements aux drones de haute technologie
et aux serveurs informatiques, tout est fabriqué en Chine. Ce ne sont
pas seulement des usines que nous avons perdues, mais des compétences
entières. Nous avons désappris à produire concrètement, à l’échelle
industrielle.
Les nouvelles artères de la planète : de la Route de la soie au cosmódrome volant
3.
Logistique : L’initiative « Une ceinture, une route » ne se limite pas à
des routes et des ports. Elle consiste à créer un nouveau système
circulatoire planétaire, dont toutes les artères convergent vers Pékin.
La Chine construit un réseau physique qui la placera au cœur du commerce
mondial, reléguant les anciennes voies maritimes, contrôlées par les
États-Unis, à la périphérie.
Et
le point culminant de cette domination matérielle réside dans ses
projets d’ingénierie, dignes de la science-fiction. Pendant que nous
débattons de toilettes neutres en genre, elle édifie les plus grands
ponts du monde, met en service les trains les plus rapides et se prépare
à l’exploitation industrielle de la Lune.
Elle
ne raisonne pas en trimestres comptables, mais en termes de
terraformation. Elle transforme littéralement le paysage terrestre.
Son
nouveau projet, qui passe encore inaperçu, est l’avion de transport «
Atlant » : ce n’est pas simplement un gros porteur. C’est une plateforme
aérienne mobile, une sorte de cosmódrome volant capable d’acheminer
entre 300 et 400 tonnes de fret sur des distances intercontinentales et
de se poser sur n’importe quelle surface plane — que ce soit la banquise
arctique ou un désert. C’est la fin de l’ère des porte-avions. À quoi
bon une base flottante quand on peut déployer, en huit heures, un groupe
tactique de bataillon complet — chars et artillerie compris — n’importe
où sur la planète ?
La Chine s’approprie le monde physique. La matière. C’est sur ce socle qu’elle érige l’étage suivant.
Niveau 2 : ÉNERGIE ET PUISSANCE
️La station-service qui s’est souvenue de tout : le paradoxe des sanctions
Le
deuxième niveau est ce qui met la matière en mouvement : l’énergie.
Ici, l’acteur principal est la Russie. On a pris l’habitude de la
considérer comme une simple « station-service » — un pays qui vend du
pétrole brut et du gaz en vivant sur l’héritage soviétique. C’est là
notre deuxième erreur catastrophique. Nous n’avons pas vu que nos
propres sanctions, censées l’affaiblir, ont produit l’effet inverse :
elles ont déclenché un processus de souveraineté forcée.
Au
lieu de s’effondrer, la Russie a entrepris, à un rythme accéléré, de
reconstruire tout ce qui avait été démantelé ou laissé à l’abandon
depuis les années 1990 : la construction de machines-outils, l’industrie
lourde et l’aéronautique civile. Les sanctions sont devenues non pas un
poison, mais un remède, l’obligeant à relancer son secteur productif et
à réactiver ses compétences scientifiques.
Ce
renouveau est visible à l’œil nu dans la renaissance de l’aviation
russe. Toute la gamme est en cours de restauration et de modernisation :
des bombardiers stratégiques à long rayon d’action comme le Tu-160M «
Cygne blanc » et l’intemporel Tu-95MS, jusqu’aux avions de ligne
moyen-courriers de nouvelle génération MC-21, destinés à remplacer
Boeing et Airbus sur le marché intérieur, ainsi qu’aux biréacteurs
régionaux Superjet 100, désormais disponibles en version entièrement
dépourvue de composants importés. C’est là l’incarnation matérielle
d’une souveraineté retrouvée.
Prométhée russe : l’énergie infinie du cycle fermé
Alors
que l’on investissait dans les énergies « vertes », encore aujourd’hui
fortement tributaires des conditions météorologiques et des batteries
chinoises, la Russie a opéré en silence une révolution dans le seul
domaine énergétique véritablement souverain et inépuisable : le
nucléaire.
Elle
ne se contente pas de construire des centrales nucléaires partout dans
le monde. Elle a mis au point ce que nul autre pays ne possède à ce jour
— et qu’aucun n’aura probablement avant les vingt ou trente prochaines
années : la technologie du cycle nucléaire fermé à neutrons rapides.
1.
Énergie infinie : cette technologie permet d’utiliser comme combustible
les matières issues du combustible nucléaire usé ainsi que l’uranium
appauvri, dont des centaines de milliers de tonnes sont déjà stockées.
En pratique, elle offre une source d’énergie pour des milliers d’années.
2.
Sécurité : les réacteurs à neutrons rapides sont fondamentalement plus
sûrs que les anciens modèles. Ils peuvent « brûler » les déchets
radioactifs les plus dangereux en les transformant en éléments moins
nocifs, résolvant ainsi le problème des dépôts géologiques de déchets
nucléaires.
3.
Indépendance : il n’est plus nécessaire d’importer de grandes quantités
d’uranium naturel. Le pays ne dépend plus des livraisons en provenance
du Kazakhstan ou du Nigeria. Sa base combustible est déjà sur son propre
territoire.
Il
ne s’agit pas seulement d’une avancée technologique. C’est un
changement de paradigme. La Russie cesse d’être une simple
« station-service » pour devenir la seule puissance mondiale dotée d’une
source d’énergie stable, propre et pratiquement inépuisable.
La physique de la nouvelle guerre : l’arme hypersonique et le « Poséidon » comme remise à zéro des règles
Mais
leur révolution énergétique ne se limite pas au nucléaire. Elle se
diversifie dans les domaines les plus avancés. Dès 2025, la Russie teste
sur ses voies fluviales un bateau de promenade, l’« Écobalt », propulsé
par des piles à combustible à hydrogène. Ce projet, qui peut sembler
modeste, constitue en réalité un marqueur clair : ils mettent au point
les technologies de demain non pas en laboratoire, mais sur des objets
réels. Et de ces petits bateaux fluviaux, ils passent à l’échelle
supérieure, en concevant de véritables géants arctiques conçus dès
l’origine pour fonctionner à l’hydrogène. C’est ainsi qu’ils bâtissent
une flotte entière de haute technologie destinée à assurer leur contrôle
sur le passage du Nord-Est.
Leurs
nouveaux systèmes d’armes — les complexes hypersoniques « Avangard » et
« Tsirkon », le tout nouveau système « Oreshnik », ainsi que le drone
sous-marin nucléaire « Poséidon » — ne sont pas de simples missiles
supplémentaires. Ce sont des armes fondées sur de nouveaux principes
physiques. L’arme hypersonique rend obsolète l’ensemble de nos systèmes
de défense antimissile. Quant au « Poséidon » — un drone sous-marin
équipé d’une propulsion nucléaire et d’une ogive mégatonique, capable de
générer un tsunami radioactif —, il change les règles mêmes du jeu. La
question n’est plus de savoir si ces torpilles sont déjà au large des
côtes américaines. La question est qu’elles pourraient s’y trouver à
tout moment, invisibles, créant ainsi une menace constante et
inéluctable.
C’est
là le « voyage dans le passé » en action : pendant que vous
perfectionnez arcs et flèches, nous introduisons la poudre à canon dans
votre monde. La Russie s’approprie l’Énergie.
Niveau 3 : LA PENSÉE
Un camp de concentration numérique avec du Wi-Fi gratuit : nous avons créé une arme contre nous-mêmes
Voici
maintenant l’essentiel. Ce domaine où nous nous croyions leaders
absolus et éternels : l’information, la pensée, la conscience. Nous
avons inventé Internet, les réseaux sociaux, la toile informationnelle
mondiale. Nous étions convaincus que c’était là l’instrument ultime de
notre victoire — que grâce aux jeans, au Coca-Cola et à Facebook, nous
convertirions le monde entier à notre cause. Nous nous sommes trompés.
Nous avons forgé une arme parfaite… qui s’est retournée contre nous.
Nous
avons bâti un camp de concentration numérique doté d’un Wi-Fi gratuit.
Un camp dont les murs sont invisibles, car tissés de confort, de
divertissements et d’un flux incessant de contenus personnalisés. Nous
avons remis les clés de notre propre conscience à des algorithmes dont
l’unique objectif est de retenir notre attention une seconde de plus. Et
pendant que nous faisons défiler nos fils d’actualité, absorbant ce «
fast-food mental », nos adversaires, eux, ont tiré les leçons
nécessaires.
️Le Grand Mur et le brouillard cognitif : deux réponses au chaos numérique
La
Chine a observé notre modèle et l’a poussé jusqu’à son absolu logique.
Elle a repris notre idée de collecte totale de données, mais en en
changeant l’objectif. Là où nous visons à « vous vendre une nouvelle
paire de baskets », elle vise à « construire une société harmonieuse et
maîtrisable ». Le Grand Pare-feu chinois, le système de crédit social,
la surveillance vidéo omniprésente — ce ne sont pas, à leurs yeux, des
répressions au sens où nous l’entendons. Il s’agit plutôt de la création
d’un espace numérique souverain. La Chine s’est isolée du chaos
informationnel occidental et façonne, à l’intérieur de son périmètre, un
citoyen numérique prévisible, loyal et efficace.
La
Russie, quant à elle, a choisi une voie différente, asymétrique. Elle a
compris qu’elle ne pourrait pas — et ne voudrait pas — construire son
propre « Facebook ». À quoi bon, puisqu’il est plus simple de pirater le
système d’exploitation même sur lequel repose la conscience occidentale
? Sa stratégie consiste à déployer un brouillard cognitif de guerre.
Elle ne cherche pas à nous convaincre de sa « vérité ». Elle démontre,
au contraire, qu’aucune vérité n’existe. Elle ne s’attaque pas à nos
arguments, mais à notre capacité même à faire confiance — que ce soit à
nos gouvernements, aux médias, à la science, ou même à nos propres yeux.
Elle transforme notre liberté d’expression en notre principale
vulnérabilité.
C’est
là la suite directe de sa philosophie « popadanets » (« transpercé dans
le temps »). Le héros « popadanets » ne discute pas avec les prêtres
locaux sur la nature des dieux. Il arrive et, en appliquant les lois de
la physique, produit un éclair avec une bobine de Tesla, sapant ainsi
les fondements mêmes de leur « néo-croyance antichrétienne ». De la même
manière, la Russie d’aujourd’hui ne débat pas avec nous des « fausses
valeurs » de la « néo-démocratie ». Elle n’entre pas dans des
discussions sur le fait de savoir si l’homosexualité est une norme ou
combien de genres on peut inventer en une semaine. À quoi bon ? Elle se
contente de démontrer que tout notre système de valeurs n’est qu’une
construction fragile, qu’un ou deux coups d’information bien placés
suffisent à faire s’effondrer.
Synthèse finale : la naissance de la Matière pensante
Leur
objectif ultime n’est pas la victoire sur le champ informationnel. Il
est bien plus profond : créer une Matière pensante. C’est la fusion des
trois niveaux. Lorsque l’intelligence artificielle ne gère plus
seulement des flux publicitaires, mais les flux d’énergie dans un cycle
nucléaire fermé. Lorsqu’un réseau neuronal trace en temps réel
l’itinéraire d’un camion « Atlant », transportant 300 tonnes de
marchandises, en contournant un cyclone au-dessus de la Sibérie. Lorsque
les technologies atomiques et de déformation ne sont plus pilotées par
l’homme, mais par un système auto-apprenant capable de concevoir de
nouveaux matériaux aux propriétés définies.
Ils
construisent une civilisation où la Pensée (l’IA) commande directement
l’Énergie (atome, hydrogène) afin de transformer la Matière (ressources,
routes arctiques) — sans intermédiaires superflus tels que politiciens,
courtiers en bourse ou influenceurs Instagram.
Conclusion : le plafond
La
question « qui dominera le ciel ? » ne se pose plus. Elle est tranchée.
Mais ce maître des cieux n’est pas simplement le fruit de la synthèse
entre le « Corps » chinois et l’Énergie russe. Ce n’est là qu’une
avant-garde.
Les
fondations et les murs porteurs de ce nouveau monde sont érigés par
cinq milliards d’êtres humains. L’Inde, avec son potentiel intellectuel
et démographique. Le Brésil, grâce à sa base de ressources naturelles.
L’Afrique du Sud, l’Iran, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite —
chacun apporte ses propres briques à ce chantier du siècle. Ensemble,
ils bâtissent une civilisation où la Pensée (l’IA) dirige l’Énergie
(l’atome) pour transformer la Matière (les ressources), au service des
intérêts de leurs peuples — et non plus de ces « valeurs universelles »
abstraites que nous avons tenté de leur imposer.
Et pour nous, l’Occident, la conséquence est aussi simple qu’effroyable :
le
ciel n’est plus cet espace infini de liberté et de possibilités. Il est
devenu un territoire où les postes sont déjà établis et les frontières
tracées.
Le sang des martyrs n’a pas séché, et le deuil des proches pas
encore fait, que les langues commencent déjà à se délier concernant les
acteurs et les complices masqué du terrible génocide de Gaza.
Selon des documents militaires américains divulgués et obtenus par le
Washington Post et l’ICIJ, plusieurs régimes arabes ont intensifié leur
coopération militaire avec l’armée d’occupation israélienne au plus
fort du génocide de Gaza — tout en condamnant publiquement les
massacres.
À Santiago du Chili, sous la présidence de Salvador Allende (3 novembre 1970 – 11 septembre 1973), on trouvait dans les rues de la ville: "On va vous faire un Jakarta", en allusion aux massacre des communistes indonésiens quelques années auparavant. Ils, les nouveaux chiots de la CIA, le firent.
(Au Canada on a effacé d'un monument le nom de "victimes" du communisme car elles étaient nazis et bandéristes et ça la foutait mal pour l'empire du Bien. Il aura fallu l'excès de zèle otanesque des dirigeants canadiens pour que l'on se rende compte du pedigree des dites victimes).
Bien
qu'il existe des plaintes concrètes liant certaines entreprises
bananières en Équateur au trafic de cocaïne, parmi lesquelles Noboa
Trading, les enquêtes judiciaires n'ont pas avancé.
Il était président de la Colombie
depuis à peine un mois quand Alvaro Uribe Vélez s'est rendu à
Washington. Le mercredi 25 septembre 2002, il devait rencontrer son
homologue George Bush fils. On raconte que, la veille, on l’avait
conduit très discrètement au Département d’État et que, dans un salon à
part, on lui montra plusieurs cartons contenant des rapports de
renseignement et des mémorandums le liant aux narcotrafiquants du Cartel
de Medellín, ainsi qu’aux structures paramilitaires. Lorsqu’Uribe Vélez
fit comprendre qu’il avait saisi le message, on l’amena en un lieu où
l’attendaient des membres de sa délégation qui furent frappés par sa
pâleur. Le National Security Archive a rendu publics quelques-uns de ces
documents en juillet 2004.
Si, avant ce jour-là en Colombie, les
gringos exerçaient déjà un grand pouvoir, à partir de ce septembre le
pays s’est retrouvé à genoux, à leur merci, parce qu'Uribe devait
accepter tout ce que Washington lui demandait. Cependant que toute
l’horrible criminalité d’Uribe était tolérée, et même encouragée par
Washington. Il devint alors clair que le narcotrafic et sa cruauté
n’étaient pas un problème pour les États-Unis, du moment qu’ils
servaient leurs intérêts stratégiques.
Car Washington dispose
d’une arme très puissante pour atteindre ses objectifs sans recourir
directement aux armes : le chantage à l’information, presque toujours
personnelle, intime, toujours destinée à être utilisée contre ses alliés
ou ceux qui veulent cesser de l’être. Car contre ceux qu’il déclare
ennemis ou peu fiables, il s’autorise à inventer des histoires, même
sans preuves à présenter. Comme l’avait dit l’un des plus grands
idéologues de ce régime, Henry Kissinger : « Être l’ennemi des
États-Unis peut être dangereux, mais être leur ami est fatal. »
Bush
fils, puis Obama, vantèrent les mérites d’Uribe pour sa « coopération »
avec les États-Unis, tandis que la cocaïne entrait dans le pays comme
par une canalisation, tout en se félicitant d’une prétendue « lutte
conjointe contre le narcotrafic et le terrorisme ».
Sous le
gouvernement du président Biden, les éloges furent adressés à Daniel
Noboa, puis continués sous Trump. Noboa, président de l’Équateur depuis
novembre 2023, est né à Miami et possède la double nationalité. Il a
poursuivi des études supérieures aux États-Unis de 2008 à 2022, avant de
revenir en Équateur pour se lancer en politique. Son père, Álvaro
Noboa, est l’homme le plus riche d’Équateur et candidat présidentiel à
cinq reprises. La fortune familiale provient principalement de la
production et de l’exportation de bananes, via l’entreprise Noboa
Trading.
En Équateur, grand producteur et exportateur mondial de
bananes, la plupart des entreprises qui les produisent et/ou les
exportent ont leur siège aux États-Unis. Certaines de ces
multinationales opèrent par le biais de filiales : UBESA, filiale de
Dole Food Company, principal exportateur ; Reybanpac, filiale de Holding
Favorita Fruit Company Ltd. ; Del Monte Fresh ; et Chiquita Brands
International.
Une autre grande entreprise est Noboa Trading,
équatorienne, détentrice de la marque Bonita Banana. Ce groupe contrôle
toute la chaîne : production, commercialisation, fabrication d’intrants
(comme les cartons d’emballage et les engrais) jusqu’à l’exportation.
Noboa Trading appartient majoritairement à Lanfranco Holding S.A., une
société offshore basée au Panama. Selon les documents révélés par les «
Pandora Papers », les véritables propriétaires et bénéficiaires de
Lanfranco sont Daniel Noboa, président de l’Équateur, et son frère Juan
(John) Noboa. Lanfranco Holding détient 51% des actions de Noboa
Trading. L’autre actionnaire est Inmobiliaria Zeus S.A., liée à d’autres
membres de la famille Noboa, dont le président lui-même.
Des
rapports journalistiques et des études, comme le rapport publié en 2025
par la Commission européenne, affirment que la plupart de la cocaïne
saisie en Europe provenait de cargaisons de bananes équatoriennes. Selon
la Commission, 57% des conteneurs quittant le port de Guayaquil,
principal port équatorien, transportaient de la drogue parmi les fruits.
Plus de la moitié de la cocaïne saisie en Équateur à destination de
l’Europe et des États-Unis provenait également de ce port, dissimulée de
cette manièr
Par exemple, la plus grande saisie de l’histoire de
l’Espagne, le 14 octobre 2024, concernait 13 tonnes de cocaïne camouflée
de cette manière, découvertes au port d’Algésiras. Le navire était
parti de Guayaquil.
L’Office des Nations Unies contre la drogue et
le crime (ONUDC) a rappelé, dans son Rapport mondial sur les drogues
2025, que la Colombie demeurait l’épicentre de la production de feuilles
de coca et de cocaïne. Il précise que la majeure partie du trafic (87%)
vers l’Amérique centrale, le Mexique, les États-Unis et l’Europe
transite par le Pacifique. En partie par la Colombie, mais
principalement depuis l’Équateur. Seuls 8% passeraient par la Caraïbe
colombienne.
Bien
qu'il existe des plaintes concrètes liant certaines entreprises
bananières en Équateur au trafic de cocaïne, parmi lesquelles Noboa
Trading, les enquêtes judiciaires n'ont pas avancé, car les procureurs
chargés de ces dossiers sont régulièrement démis de leurs fonctions. Le
nouveau venu doit alors tout reprendre presque à zéro.
Malgré
cela, et reprenant presque les éloges qui avaient été adressés en son
temps à Álvaro Uribe, le célèbre narco-paramilitaire, le 5 septembre
dernier, le secrétaire d’État Marco Rubio a affirmé depuis Quito que les
États-Unis sont l’un des grands alliés de l’Équateur en matière de
sécurité, de commerce et de coopération. La chancelière Gabriela
Sommerfeld a clairement déclaré que l’Équateur était prêt à s’aligner
sur les priorités de son principal partenaire : « Les objectifs que
s’est fixés le président Daniel Noboa sont exactement ceux du président
Trump.
La chancelière s’est aussi félicitée des accords conclus à
l’occasion de la visite du secrétaire d’État, qui prévoyaient 13,5
millions de dollars pour combattre les « menaces narcoterroristes », et 6
millions pour des drones destinés à renforcer la Marine. Déjà en
juillet, les Forces armées équatoriennes avaient reçu des équipements
technologiques d’une valeur de 8 millions de dollars pour le contrôle
frontalier terrestre et maritime, livrés par les États-Unis, afin de «
renforcer les capacités » militaires dans la lutte contre le
narcotrafic, selon le ministre de la Défense Gian Carlo Loffredo.
En
contrepartie de ces apports militaires, Sommerfeld a annoncé que
l’Équateur avait accédé à une demande clé de Rubio : accueillir des
migrants expulsés des États-Unis, en tant que « pays tiers sûr », comme «
geste de gratitude » envers son partenaire : « L’Équateur va soutenir
les États-Unis dans cette démarche, c’est un symbole, c’est important
pour notre allié. »
Lors de la conférence de presse, un
journaliste rappela à Rubio que le rapport de l’ONU sur les drogues
avait été clair : près de 90% de la cocaïne sort par le Pacifique,
principalement par le pays qu’il visitait, l’Équateur. Sans s’attarder,
le journaliste lui demanda pourquoi un quasi-blocus naval frappait le
Venezuela, alors que par ce pays ne transitait qu’à peine 5% de la
cocaïne, elle-même en provenance de Colombie. Il n’a pas eu le temps de
lui dire, et aucun autre journaliste n’a osé ajouter, que l’ONU
soulignait que le Venezuela n’était pas un acteur majeur de la
production ni du trafic de drogues dans la région, son territoire étant
reconnu libre de cultures illicites.
Et dans sa réponse, Marco
Rubio a laissé transparaître une certaine colère : « On dit que le
Venezuela n’est pas impliqué dans le trafic de drogues parce que l’ONU
l’affirme. Mais je me fiche de ce que dit l’ONU ! Parce que l’ONU ne
sait pas de quoi elle parle ! Maduro est inculpé par un grand jury du
district sud de New York. (…) Il n’y a aucun doute que Maduro est un
narcotrafiquant. » Ainsi balaya-t-il les rapports internationaux sur le
narcotrafic pour justifier des actions unilatérales, en l’occurrence
militaires, de son gouvernement
La vérité est que, jusqu’à
aujourd’hui, la justice américaine n’a présenté aucune preuve tangible
contre le président Maduro ni contre aucun haut dirigeant de cette
nation bolivarienne.
En 2025, le régime étasunien aurait fourni
environ 25 millions de dollars au gouvernement Noboa pour lutter contre
la principale route du trafic de cocaïne, que la BBC qualifiait déjà en
2021 « d’autoroute de cocaïne vers les États-Unis et l’Europe ».
Ces
25 millions devraient servir à combattre les mafias étrangères en
Equateur — italiennes, albanaises, colombiennes et mexicaines — qui,
chaque année, contrôlent davantage de territoire. Mais nul ne sait
comment de tonnes de cocaïne se retrouvent dissimulées dans les bananes
principalement, ainsi que dans des cargaisons de crevettes et d’autres
produits d’exportation.
Sans doute trop modestes pour ce travail
titanesque, ces 25 millions contrastent avec les dépenses colossales
engagées pour maintenir le siège militaire contre le Venezuela, qui
serait le grand centre du narcotrafic universel, selon Washington : 8
cuirassés, 2 400 missiles, près de 8 000 marines et même un sous-marin
nucléaire, qui coûtent au contribuable étasunien entre 7 et 10 millions
de dollars par jour. Ils sont stationnés depuis près d'un mois au large
des côtes bolivariennes, où leur seule prouesse fut de couler une petite
barque avec un missile. Faites le calcul.
En définitive, ces 25
millions de dollars, bien utilisés, seraient suffisants pour surveiller
de près les exportateurs de bananes, à commencer par l’entreprise de ce
grand « coopérateur », le président Noboa, ainsi salué par Marco Rubio
entre embrassades.
Et entre deux étreintes, Washington tient Noboa bien en main. Comme Uribe jadis. Pauvre Équateur.
Non seulement les États-Unis ont contribué à créer les
conditions permettant aux Khmers rouges d’accéder au pouvoir au Cambodge
en 1975, mais ils ont également soutenu activement cette force
génocidaire, tant sur le plan politique que financier. Dès janvier 1980,
les États-Unis finançaient secrètement les forces exilées de Pol Pot à
la frontière thaïlandaise. L’ampleur de ce soutien – 85 millions de
dollars entre 1980 et 1986 – a été révélée six ans plus tard dans une
correspondance entre Jonathan Winer, avocat du Congrès et alors
conseiller du sénateur John Kerry (Démocrate-Massachusetts) de la
commission des affaires étrangères du Sénat, et la Vietnam Veterans of
America Foundation. Winer a déclaré que ces informations provenaient du
Congressional Research Service (CRS). Lorsque des copies de sa lettre
ont été diffusées, l’administration Reagan était furieuse. Puis, sans
expliquer clairement pourquoi, Winer a réfuté ces chiffres, sans
toutefois contester qu’ils provenaient du CRS. Dans une deuxième lettre
adressée à Noam Chomsky, Winer a toutefois réitéré l’accusation
initiale, qu’il m’a confirmée, la déclarant « absolument correcte ».
Washington a également soutenu les Khmers rouges par l’intermédiaire
des Nations unies, lesquelles ont fourni à Pol Pot le moyen de revenir
au pouvoir. Bien que le gouvernement khmer rouge ait cessé d’exister en
janvier 1979, chassé par l’armée vietnamienne, ses représentants ont
continué à occuper le siège du Cambodge à l’ONU. Ce droit a été défendu
et encouragé par Washington qui y voyait un prolongement de la Guerre
froide, un moyen pour les États-Unis de se venger du Vietnam et un
élément de sa nouvelle alliance avec la Chine (principal bailleur de
fonds de Pol Pot et ennemi de longue date du Vietnam). En 1981, le
conseiller à la Sécurité nationale du président Carter, Zbigniew
Brzezinski, a déclaré : « J’ai encouragé les Chinois à soutenir Pol Pot.
» Il a ajouté que les États-Unis avaient « fermé les yeux » lorsque la
Chine avait envoyé des armes aux Khmers rouges via la Thaïlande.
Buscada
por el FBI y la CIA. Evadida de una cárcel de máxima seguridad en Nueva
Jersey. Perseguida por mercenarios y cazarrecompensas. Exiliada y
acogida en Cuba como una heroína. Requerida a Fidel Castro por el Papa
Juan Pablo II. Esta es la historia de Assata Shakur, la Pantera más
negra y la mujer más…
Se busca
Es el día miércoles 2 de mayo del año 1973. Tres jóvenes negros
viajan en un Pontiac blanco desde Nueva Jersey hacia el sur de los
Estados Unidos. Son los tiempos duros de “la ley y el orden” de Richard
Nixon, y los protocolos del programa de contrainteligencia del FBI
exigen detener por faltas menores a los militantes o a los sospechosos
de serlo. Negros, latinos, indígenas, pacifistas, socialistas,
feministas. Da igual: todos son rotulados -y tratados- como criminales,
terroristas y enemigos del Estado.
Las fuentes oficiales dicen que el automóvil tenía dañadas las luces
traseras. Los oficiales Werner Foerster y James Harper deciden
detenerlo, quizás informados ya de la presencia en el vehículo de tres
militantes clandestinos del movimiento negro radical, o quizás sólo por
que estos “conducían en estado de negritud”, según la ocurrente
expresión de Mumia Abu-Jamal. En el vehículo viajan Zayd Malik Shakur,
Sundiata Acoli y Assata Shakur, ex miembros del Partido Pantera Negra y
por ese entonces integrantes del Ejército Negro de Liberación.
Organizaciones sindicadas como “grupos de odio nacionalistas negros”,
etiqueta que es aplicada de forma indiscriminada a agrupamientos de
propósitos diversos como la Nación Musulmana, la República de la Nueva
Afrika o el Comité Coordinador de Estudiantes No Violentos.
La escena, a partir de entonces, es rápida, confusa, trágica. La
secuencia exacta de voces y movimientos es difícil de reconstruir, pero
lo que sabemos es que ante los gritos de los policías Assata levanta
instintivamente sus dos manos en el aire, cuando un disparo le destroza
la clavícula. Sólo Zayd atina a defenderse y tomar una de las armas que
están en el asiento trasero del Pontiac. Cae abatido y con él también
uno de los oficiales de policía. Assata recuerda: “había luces y
sirenas. Zayd estaba muerto. Mi mente sabía que él estaba muerto. El
aire era como cristal frío. Se alzaban enormes burbujas y estallaban.
Cada una parecía una explosión en mi pecho. Me sabía la boca a sangre y a
tierra”.
Luego es sacada a rastras del vehículo. Parece no haber rastros de
Sundiata. -Quizás haya logrado escapar- piensa, pero Sundiata será
arrestado poco tiempo después. Mientras tanto más policías se aglomeran a
su alrededor para darle una paliza. Uno de ellos le apoya el cañón de
un arma reglamentaria en la sien. La acusan de haber disparado pero sus
dedos, libres de pólvora según el test de activación de neutrones que le
hacen en el acto, no dejan lugar a dudas. Su mano cuelga inerte, casi
muerta. Assata no disparó. No pudo haber disparado con esa tira de carne
flácida que le cuelga del cuerpo y supo ser su mano diestra. Ha
recibido, en cambio, tres disparos: tiene un pulmón herido, una bala
alojada en el pecho y un brazo completamente paralizado. Las ráfagas de
dolor y una nueva tanda de golpes acaban por desvanecerla.
Una educación hostil
Antes de elegir el nombre de Assata Olugbala Shakur, su nombre de
combatiente, fue bautizada como JoAnne Deborah Byron. Apellido que en
nupcias cambió por el de su primer esposo Louis Chesimard, un activista
del que separaría por exigir que ella se amoldara a los preceptos de lo
que se suponía debía ser una mujer: la “santísima trinidad” de
esposa-madre-ama de casa. Con el tiempo Assata consideraría a sus
apellidos como “sus nombres de esclava”. Era frecuente en las décadas
del ‘60 y ‘70 que los activistas negros se rebautizaran con nombres de
inspiración africana y árabe, influidos por la revalorización del
verdadero “viejo continente” producida por el poderoso movimiento
musulmán negro y por el Black Power, aunque la huella del orgullo africano fuera visible desde los tiempos del movimiento Back to África y
las teorías caribeñas de la negritud. Assata, como tantas y tantos
otros, renegó de los apellidos legados a sus antepasados por sus dueños
esclavistas, que en este caso se remontaban en la historia hasta la
colonia francesa de Martinica. Otros ex esclavos, en cambio, recibieron o
se adjudicaron un apelativo genérico, el casi universal apellido
freeman -hombre libre-, con el que sus abuelos insistían en llamar a la
playa en que se emplazaba su negocio familiar en Wilmington.
Assata nació en Jamaica, pero no en la isla caribeña, sino en la
Jamaica del distrito de Queens en Nueva York. Curioso sitio, y con
extraños vecinos. Apenas un año antes había nacido allí, a pocas cuadras
de su casa, el nieto de un desertor y migrante ilegal llegado de
Kallstadt, en la actual Alemania. Un tal Donald John Trump -o Trumpf,
porque tal era el apellido familiar original-, quién sería a la postre
presidente de los Estados Unidos. Es difícil imaginar trayectorias más
divergentes que la de aquellos dos niños neoyorquinos.
Por lo demás Assata tuvo una infancia que llamaríamos normal si
normales fueran las sociedades racistas y la educación segregada del
tiempo de las leyes Jim Crow. Su niñez en el estado sureño de Carolina
del Norte estuvo marcada por una educación familiar que buscaba
inculcarle un fuerte sentido de la dignidad personal. Así lo recuerda en
su autobiografía: “Mis abuelos me prohibieron estrictamente que
contestara «Sí, señora» y «Sí, señor», o que me mirara los zapatos e
hiciera gestos serviles al hablar con los blancos. «Cuando hables con
ellos, mírales a los ojos», me decían. «Y habla en voz alta para
demostrar que no eres tonta»”.
Pero la educación para la vida ruda que debían enfrentar las
poblaciones afronorteamericanas también estaba mezclada con fuertes
dosis de meritocracia, valores propios de la pequeña y alta burguesía
negras educadas “a la Booker T. Washington”, una suerte de “Sarmiento
negro”. Sus abuelos querían que su nieta fuera una persona laboriosa,
que se integrara al selecto grupo de lo que llamaban “el diez por ciento
con talento”, que se juntara “con niños decentes” y que no utilizara
los idiolectos propios del inglés popular y sureño. Afortunadamente,
Assata no tardó en encontrarse con el eslabón más rebelde de su
genealogía familiar: su tío “Willie el salvaje”, un zambo de negra e
indio Cherokee, una suerte de leyenda que en las primeras décadas del
siglo denunciaba la explotación de las “personas de color” y desafiaba a
boca de jarro las normas de la sociedad segregada.
En la escuela en el sur todo era de segunda mano: la educación, los
sueldos de los profesores y hasta los libros, que llegaban usados y
rotos después de ser descartados en las escuelas para niños blancos.
Pero aún más complejo que el racismo institucionalizado, era el racismo
auto-infligido por una educación que estimulaba prácticas
auto-denigratorias que indicaban que lo negro era sucio, feo, malo y
estúpido. Paradójicamente, Assata recordaría sinsabores equivalentes en
la educación paternalista de las “escuelas integradas” de Nueva York en
donde, siendo la única niña negra de la clase, era vista y tratada como
una suerte de chimpancé parlante al que se le prodigaban
condescendientes “sonrisitas para negritos”.
Una re-educación política
Años más tarde, el proceso de re-educación en el movimiento negro le
llevaría a desandar todas las mitologías estatales de la historia
norteamericana, desde la Guerra de Independencia hasta la Guerra de
Secesión, desde la Conquista de América hasta la Guerra de Vietnam, en
un país que se ha pasado guerreando 223 de sus 244 años de existencia.
Una Assata urticante concluiría, por ejemplo, que el proceso por el que
las Trece Colonias conquistaron su independencia respecto de los
británicos fue una “mal llamada revolución” y que fue “liderada por unos
cuantos niños ricos blancos que se cansaron de pagar impuestos elevados
al rey”.
También sus ídolos de la infancia fueron demolidos uno a uno, desde
el patriarca Abraham Lincoln, partidario de la deportación masiva de
negros a Liberia, Haití o cualquier otro destino de África o el Caribe,
hasta Elvis Presley, quién se refirió a que lo único que los negros
podían hacer por él era comprar sus discos y lustrarle los zapatos, y
que en 1970 se ofreció como soplón voluntario para el FBI.
Entre la venalidad de los arribistas negros y la banalidad del restringido y racializado American Way of Life,
la joven Assata irá buscando a tientas un camino. Un hito importante
será su encuentro con estudiantes africanos en la universidad, los
cuales le revelarán un mundo más allá de los estereotipos en boga: el de
los comunistas que en las tiras cómicas se vestían todos iguales y
trabajaban invariablemente en las minas de sal, el de los africanos
calibanescos que comían carne humana y andaban con taparrabos, o el del
evangelio democratizador que se suponía que los marines norteamericanos
-blancos y negros- estaban llevando a Vietnam. Se trataba de cepillar a
contrapelo una educación plena de estereotipos y fantasías sobre el
Tercer Mundo en un país que, como ninguno, ignora profundamente el mundo
que domina. Assata concluirá en aquel período como estudiante: “Todo es
mentira en amérika [sic] y lo que lo mantiene en marcha es que
demasiada gente se lo cree”.
Como muchos jóvenes, Assata llegó al movimiento negro radical después
de un proceso de desencantamiento con los límites de la prédica
no-violenta y del proyecto integracionista del movimiento por los
derechos civiles. Integrarse, sí. ¿Pero integrarse a qué? ¿Cuántos y
quiénes podrían hacerlo? ¿Qué pasaba con el “noventa por ciento sin
talento”? ¿Cuál era el costo -político, ideológico, ético- de dicha
integración? ¿Integrarse no implicaba negarse? ¿Era posible integrarse
sin usufructuar parte de los dividendos de la política colonial? ¿No se
asemejaban acaso las políticas que el Estado norteamericano implantaba
en lo guetos de negros con la que exportaba a los países del Tercer
Mundo?
Assata evoca las reuniones de la NAACP (la Asociación Nacional para
el Progreso de las Gentes de Color), una veterana organización de la
pequeña burguesía negra que predicaba la no-violencia y el “poner la
otra mejilla”. Pero la violencia estatal continuó devorando por igual a
pacifistas y beligerantes, mientras la lista de mártires se engrosaba
por aquellos años: Viola Liuzzo, Imari Obadele, Medgar Evers, Martin
Luther King, Malcolm X, Fred Hampton, Emmet Till, George Jackson, Nat
Turner, James Chaney y un largo etcétera. Assata llegará a la conclusión
de que “nadie en el mundo, nadie en la historia, ha conseguido nunca su
libertad apelando al sentido moral de la gente que los oprimía” y que
“el movimiento de los derechos civiles nunca tuvo ni la más mínima
posibilidad de triunfar”.
El nacionalismo negro estaba entonces en pleno auge, y durante su
estadía en el Manhattan Community College, Assata no tardará en
participar en reuniones de la República de la Nueva Afrika, un
movimiento que pretendía el establecimiento de una nación negra
independiente en los estados sureños de Carolina del Sur, Georgia,
Alabama, Mississippi y Louisiana. Lo que antes se conocía como el Black Belt o
“cinturón negro”, una vieja propuesta que ya habían defendido
comunistas como Harry Haywood. Sin embargo, Assata prescindirá de una
participación activa hallando la idea sugerente pero inviable.
Entrará en contacto también con los Boinas Cafés, una organización
revolucionaria de chicanos; con los maoístas chino-estadounidenses de la
Guardia Roja en Chinatown; y visitará repetidas veces a los indígenas
estadounidenses y canadienses que habían ocupado la Isla de Alcatraz en
protesta por la desposesión de sus tierras. Y, finalmente, en ese
hervidero que eran los Estados Unidos de finales de los ‘60 y principios
de los ‘70, conocerá en Oakland al Partido Pantera Negra, con lo que su
concepción política dará un giro internacionalista. A través del
estudio de los procesos de liberación africanos llegará,
indefectiblemente, a identificarse con el marxismo y el comunismo, en
particular con los procesos y líderes del Tercer Mundo: Fidel Castro, Ho
Chi Minh, Agostinho Neto, Carlos Marighella, Ernesto Che Guevara, etc.
Pantera
Su fascinación con las Panteras Negras, una organización fundada en
1966, había sido inmediata, aunque su incorporación a la organización
ellas se hubiera demorado. En particular, le atraía el hecho de que sus
militantes “no trataban de parecer intelectuales hablando de la
burguesía nacional, del complejo industrial (…) Simplemente llaman
cerdos a los cerdos. (…) Hablaban de los cerdos políticas racistas y de
los perros racistas”. En particular, vio en la organización una
estrategia coherente de autodefensa por parte de las propias
comunidades, y un aceitado ejercicio de solidaridad con los movimientos y
procesos de liberación del Asia, África y América Latina y el Caribe.
Pese a reflexionar en ese entonces en torno a la insuficiencia de las
luchas estudiantiles, Assata continuó desarrollando labores en el medio
universitario para el Partido. También se desempeñó en el equipo médico
de la organización y en el Programa de Desayunos que la organización
brindaba gratuitamente a más de 10 mil niños, rebasando las tradiciones
prácticas de caridad eclesiástica y ensayando desde allí la organización
política de las comunidades. Por ese entonces trabajó en la campaña
para recaudar fondos por la liberación de las 21 panteras que habían
sido encarceladas por el FBI.
Eran tiempos frenéticos, apabullantes, con muchos nombres y muchos
rostros que circulaban profusamente. Pronto el Partido y otras
organizaciones entrarían en un espiral descendente en el que se
confundirían y amplificarían los errores propios y las intrigas del
COINTELPRO, el programa creado por el FBI para infiltrar y destruir los
movimientos radicales. La campaña sistemática y masiva del programa
incluía intrigas, rumores, cooptación, espionaje, infiltraciones,
represión, tortura, asesinato y otros métodos non sanctos. Su
resultado sería el desbaratamiento de organizaciones enteras, el
encarcelamiento masivo de disidentes y el vuelco precario de miles de
militantes a la clandestinidad.
Assata propone, en su autobiografía, un ejemplar ejercicio de crítica
y autocrítica que incluye, entre varios elementos: el señalamiento del
fetichismo armado de ciertos miembros del partido; la insuficiencia de
los planes de formación política, en particular en lo que a organización
y movilización refiere; un internacionalismo a veces algo abstracto que
prescindía del análisis y la comprensión de la propia realidad
nacional; un método de trabajo que en su versión más tosca se resumía en
la fórmula portación de armas más asistencia social; el automatismo y
la falta de pedagogía de ciertos procesos; el sexismo y el “culto al
macho” reforzado por la propia lógica militarista; las dificultades para
distinguir entre la lucha política legal y la lucha militar
clandestina; el dogmatismo y las purgas de dirigentes y militantes
valiosos; y, finalmente, el militarismo y la sustitución del trabajo
político. Como resultante Assata y otros militantes abandonarían un
partido ya casi reducido a su mínima expresión, y se integrarían a una
organización más flexible y descentralizada: el Ejército Negro de
Liberación.
Presa
“Hermanos y hermanas Negras, quiero que sepan que les amo y que
espero que en algún lugar de su corazón tengan amor para mí. Me llamo
Assata Shakur (…) y soy una revolucionaria. Una revolucionaria Negra.
Con eso quiero decir que he declarado la guerra a todas las fuerzas que
han violado a nuestras mujeres, han castrado a nuestros hombres y han
mantenido a nuestros bebés en la miseria. (…) Soy una revolucionaria
Negra y, como tal, soy una víctima de toda la ira, el odio y la
maledicencia de la que ameŕika [sic] es capaz. Como a todos los otros
revolucionarios Negros, amérika intenta lincharme”. Así comienza una
cinta grabada el 4 de julio de 1973.
Los policías que la custodian en el hospital se saludan
alternativamente con la venia militar o con el saludo nazi-fascista.
Assata asegura que siempre los llamó nazis o “cerdos fascistas” en un
sentido figurado, pero ahora se enfrenta a la dura constatación de la
retórica. A partir de allí comenzará un largo periplo de seis años y
medio por hospitales, tribunales, cárceles de alta seguridad y celdas de
aislamiento. Será encontrada inocente en la inmensa mayoría de los
cargos que se le imputan -portación ilegal de armas, asalto, secuestro,
asesinato- incluso de aquellos por los que huía la noche de su captura.
A partir de allí será sometida a toda suerte de privaciones. A la
libertad, primero, pero será muy clara sobre sus limitaciones históricas
para las poblaciones negras de los Estados Unidos: “La única diferencia
entre esto [la cárcel] y la calle es que una es de máxima seguridad y
la otra es de mínima. La policía patrulla nuestras comunidades justo
como aquí patrullan los guardias. No tengo ni la más remota de lo que se
siente ser libre”. Será recluida en cárceles de hombres. Se le denegará
el reposo y hasta la oscuridad, sometida a 24 hs diarias de vigilancia.
Le será retaceada una atención médica adecuada, incluso durante su
embarazo y su parto en el Hospital Elmhurts, en el que dará a luz atada a
una cama y custodiada por policías armados. Durante nueve meses no
dejará de preguntarse: “¿Cuántos lobos se ocultan en la maleza para
comerse a mi hijo?”.
Luego será obligada a trabajar de forma gratuita en prisiones
federales, una práctica rutinaria y “legal” a resguardo de la fatídica
Decimotercera Enmienda de la Constitución. Se le confinará en
aislamiento durante largos períodos hasta el punto de llegar a perder de
forma temporal y parcial la capacidad del habla. Será agredida
sexualmente y amenazada permanente con ser violada. Sufrirá juicios de
carácter netamente político, con procesos inverosímiles, jurados casi
exclusivamente blancos y jueces venales, pero no se le permitirá una
defensa política de su vida y de su causa. Será linchada mediáticamente,
y el juicio que finalmente la encontrará culpable de homicidio tan sólo
rubricará la culpabilidad ya sentenciada por la prensa. Sufrirá todas
las formas de tortura concebibles para al fin afirmar indoblegable: “yo
tengo que ver con la vida”.
A esta altura de la pequeña saga conformada por nuestras bitácoras,
es inevitable que la historia de los y las internacionalistas se
atraigan, se acerquen, se rocen y en ocasiones hasta se abracen. En la
cárcel de mujeres de máxima seguridad de Alderson, en Virginia
Occidental, diseñada para “las mujeres más peligrosas del país”, Assata
se topará con una mujer blanca entrada en años, con cabello entrecano,
“de aspecto digno, de maestra de escuela”. Inmediatamente reconocerá en
ella a Lolita Lebrón, la heroica independentista puertorriqueña. Nunca
la sororidad tuvo un sentido más pleno que entre esas dos mujeres que
pagaban con holgura el precio de su determinación. Lolita, valiente,
inquebrantable, mística, llevaba ya un cuarto de siglo privada de su
libertad, alejada de su patria y sus afectos y políticamente aislada,
sostenida tan sólo por su fe y su pasión por la causa independentista
boricua. Lolita marcaría también otro hito en el proceso de formación de
Assata, al llevarla a reconsiderar aspectos como la religiosidad
popular, los vínculos entre cristianismo y socialismo, y a conocer la
corriente latinoamericana de la teología de la liberación.
Libre y sin color
“«Vas a volver pronto a casa (…) No sé cuándo, pero vas a volver a
casa. Vas a salir de aquí.», le había dicho su abuela tras un sueño que
sería un presagio. De esta vida llena de hiatos, clandestinidad y falsas
identidades -Assata llegaría a tener más de 20 alias- nada resulta tan
misterioso como su fuga, el 2 de noviembre de 1979, del penal de máxima
seguridad del condado de Clinton. Lo poco que sabemos es que tres
hombres negros armados irrumpieron en la prisión tomando a dos guardias
de rehén, liberándola en una operación de precisión quirúrgica, sin
bajas ni heridos. Se presume que se habría tratado de una acción de sus
compañeros del Ejército Negro de Liberación largamente planificada.
Después de cinco nuevos años de vida clandestina bajo las narices de la
CIA y el FBI, Assata conseguiría pegar un salto de gacela hacia Cuba.
Allí verá, materializadas en aquel pequeño laboratorio insular, las
tentativas de igualdad radical por las que siempre había luchado:
“Aunque saben del racismo y del ku klux klan y del desempleo, ese tipo
de cosas no entran en su concepción de la realidad. Cuba es un país de
esperanza. Su realidad es tan diferente. Me impresiona cuánto han
conseguido los cubanos en tan poco tiempo de Revolución”. En particular,
le sorprendería la realidad y el tratamiento de la cuestión racial: “Se
veía a Negros y blancos juntos por todas partes: en coches y paseando
por las calles. Niños de todas las razas jugaban juntos.” “Un amigo
cubano Negro me ayudó a entenderlo mejor. Me explicó que los cubanos
daban por hecho su herencia africana. (…) Me dijo que Fidel, en un
discurso, le había dicho a la gente: -Todos somos Afro-Cubanos, de los
más paliduchos a los más morenos. (…) Aunque estaba de acuerdo conmigo,
me dijo enseguida que él mismo no se veía a sí mismo como Africano: -Yo
soy cubano”.
Aún más, aquel amigo suyo se refirió a un compatriota
desembozadamente racista que se había opuesto, originalmente, al
matrimonio de una de sus hijas con un negro cubano. Su razonamiento,
ante el hecho, será inapelable: “Mientras apoye la Revolución, no me
importa lo que piense. Me importa más lo que hace. Si realmente apoya la
Revolución, cambiará. E incluso si no cambia, sus hijos van a cambiar. Y
sus nietos cambiarán todavía más.” ¿Es qué acaso se ha establecido
mejor definición de lo que es una revolución?
En otra ocasión Assata fue llamada “mulata” y llegó a sentirse
profundamente ofendida: “-Yo no soy mulata. Yo soy una mujer Negra, y
estoy orgullosa de ser Negra -le decía a la gente (…) Algunas personas
entendían lo que quería decir, pero otros pensaban que estaba demasiado
obsesionada con el tema racial. Para ellos, mulato era simplemente un
color, como rojo, verde o azul. Pero para mí representaba una relación
histórica.” De pronto, en aquella latitud caribeña, Assata Shakur, “la
pantera más negra”, negra en lo que negro tenía de carga racista y
estigmatizante, pero también de orgullo racial y autoestima combatiente,
se encontraba en Cuba sin color. Quizás alguna vez se haya topado con
aquel poema de Nicolás Guillén que rezaba: Aquí hay blancos y negros y
chinos y mulatos. / Desde luego, se trata de colores baratos / pues a
través de tratos y contratos / se han corrido los tintes y no hay un
tono estable. / (El que piense otra cosa que avance un paso y hable.)
Assata Shakur, a sus 73 años, lleva una vida discreta y sigilosa para
no llamar la atención de los mercenarios y cazarrecompensas que buscan
capturarla y colocarla en una lancha rumbo a la Florida, en donde el
FBI, burlado una y otra vez, ha ampliado a 2 millones de dólares la
cifra que ofrece por su captura. Alguna vez Assata preguntó: “¿Por qué
merezco tal atención? ¿Por qué represento tal amenaza?”. La pregunta
encabezaba una carta personal que envió al papa Juan Pablo II, quien
había sido convencido de solicitar a Fidel Castro su extradición a los
Estados Unidos durante su visita a Cuba en enero de 1998. Un inmenso
cartel aparecido en la isla dió la respuesta lacónica de Fidel y el
pueblo cubano: hands off Assata -las manos fuera de Assata-.
Quizás Assata Olugbala Shakur represente aún hoy una amenaza por haber
logrado comprender que correspondía a ella concretar los sueños que su
abuela soñaba, “que los sueños y la realidad son opuestos” pero que “es
la acción lo que los sintetiza”
Un président qui ressemble à Eisenhower à la fin de son mandat, lorsqu'il mit en lumière ce qu'il désigna sous le nom de "complexe militaro-industriel". Le film commence sous ses auspices.
Rencontre Trump-Europe-Ukraine :
Promouvoir la division du travail et la planification stratégique
Après
la récente rencontre entre le président américain Donald Trump et le
président russe Vladimir Poutine en Alaska et la rencontre suivante
entre les dirigeants européens, le président ukrainien et le président
Trump à Washington, une politique américaine prévisible a commencé à
prendre forme.
Comme l'a déclaré dès février de cette année le secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth, s'adressant aux
dirigeants européens au sein du Groupe de contact pour la défense de
l'Ukraine, l'Europe a été chargée de prendre le contrôle de la guerre
par procuration de Washington contre la Russie en Ukraine en augmentant
les dépenses de l'OTAN, la production d'armes et le transfert de soutien
matériel à l'Ukraine, permettant ainsi aux États-Unis de se tourner
vers la région Asie-Pacifique en donnant la priorité au confinement de
la Chine dans cette région.
Le
secrétaire Hegseth a clairement indiqué que le conflit serait gelé, et
non terminé, et que des troupes européennes et non européennes (pas des
troupes américaines) seraient transférées en Ukraine pour assurer un
gel, suivi par une réorganisation et une reconstruction des forces
armées ukrainiennes par l'Europe.
Comme l’a expliqué le secrétaire Hegseth, « la réalité de la pénurie »
empêche les États-Unis de s’engager directement et pleinement dans deux
conflits entre grandes puissances, avec la Russie et la Chine,
simultanément, ce qui nécessite le gel d’un conflit pendant que les
États-Unis en poursuivent un autre.
Le
fait même que les États-Unis cherchent à affronter la Chine en
Asie-Pacifique, de la même manière qu'ils ont affronté la Russie en
Ukraine, démontre un désintérêt total pour une paix véritable avec l'une
ou l'autre de ces nations. Les États-Unis estiment que s'ils
parviennent à contenir la Chine plus tôt, ils pourront ensuite affronter
et contenir la Russie.
Le document de 2024 de la Marathon Initiative « Strategic Sequencing, Revisited », rédigé par Wess Mitchel, un ancien responsable de l'administration Trump, affirmait explicitement :
L'idée
du séquençage est simplement de concentrer les ressources contre un
adversaire afin d'affaiblir ses énergies perturbatrices avant de se
tourner vers un autre, soit pour le dissuader, soit pour le vaincre.
Mitchel a également utilisé le terme « division du travail » en ce qui concerne les « alliés des États-Unis en Europe et dans l’Indo-Pacifique
», un terme que le secrétaire Hegseth a répété mot pour mot à Bruxelles
plus tôt cette année, révélant la « division du travail » et le «
séquençage stratégique » comme des politiques en tandem que Washington
poursuit.
Le
test ultime pour la Russie et le monde multipolaire émergent ne réside
pas seulement dans leur capacité à supporter les desseins américains
visant chacun d’eux individuellement, mais dans leur capacité à
retourner cette stratégie contre Washington.
Premiers principes : la quête de primauté de l'Amérique
À la fin de la guerre froide, comme le rapportait le New York Times (NYT) dans son article de 1992 , « Le plan stratégique américain appelle à garantir l’absence de rivaux », les États-Unis cherchaient à créer
« un monde dominé par une superpuissance dont la position peut être
perpétuée par un comportement constructif et une puissance militaire
suffisante pour dissuader toute nation ou groupe de nations de contester
la primauté américaine ».
Le même article notait le rejet par Washington de « l’internationalisme collectif », appelé aujourd’hui « multipolarisme ».
Les
ambitions américaines visant à contenir la Russie et la Chine, tant
dans les années 1990 qu’aujourd’hui, ne sont pas motivées par des
préoccupations légitimes de sécurité nationale, mais plutôt par la
préservation des « intérêts »
américains à l’étranger, à l’intérieur et le long des frontières des
deux nations, d’une manière que les États-Unis eux-mêmes ne toléreraient
jamais qu’une autre nation leur fasse subir.
Le « séquençage stratégique » américain ne se limite pas à la Russie et à la Chine. Ce séquençage, combiné à diverses mises en œuvre de la « division du travail », vise à exploiter et à affaiblir toute nation qui remet en cause la primauté américaine.
Si
l'attention immédiate se porte sur l'Asie-Pacifique, les pays du
Moyen-Orient, d'Amérique latine et d'Afrique sont également ciblés
stratégiquement. La déstabilisation de la Syrie, la pression persistante
sur l'Iran et les efforts continus visant à isoler les pays du reste du
monde multipolaire qui entretiennent des liens avec la Russie et la
Chine (comme la Thaïlande et le Cambodge en Asie du Sud-Est)
s'inscrivent tous dans ce plan plus vaste.
L'objectif
de Washington est d'empêcher la formation d'une alliance cohésive et
multipolaire susceptible de contrecarrer ses ambitions hégémoniques. En
éliminant les nations une par une, ou quelques-unes à la fois, les
États-Unis espèrent maintenir leur domination et empêcher la formation
d'un front uni.
Tant que la primauté demeure le principe unificateur de la politique étrangère américaine, la « recherche de la paix » n’est qu’un moyen de gagner du temps pour rectifier les revers dans une région tout en redoublant d’efforts dans une autre.
L'Ukraine est la guerre de l'Amérique, et de l'Amérique seule
En ce qui concerne la guerre en Ukraine elle-même, malgré les récents commentaires de l’administration Trump la décrivant comme « la guerre de Biden » ou affirmant que « le président Zelenskyy d’Ukraine peut mettre fin à la guerre avec la Russie presque immédiatement »,
la guerre est en fait un produit de la politique étrangère américaine
qui s’étend sur plusieurs administrations présidentielles, y compris le premier mandat du président Trump .
Les États-Unis commandent actuellement les forces armées ukrainiennes, comme l'a révélé un article
du New York Times publié plus tôt cette année. Depuis 2014, la Central
Intelligence Agency (CIA) américaine contrôle et dirige les services de
renseignement ukrainiens, a également rapporté le New York Times .
Ainsi,
le conflit en Ukraine ne pourra prendre fin que lorsque les États-Unis
le décideront ou y seront contraints par la Russie.
Comprendre
ces principes fondamentaux de la politique étrangère américaine
concernant le conflit en Ukraine est essentiel pour réussir à naviguer
dans la propagande que les États-Unis et leurs États clients utilisent
pour tenter de « division du travail » et de « séquençage stratégique ».
Continuité du programme sous Trump
Depuis
son arrivée au pouvoir, l'administration Trump elle-même a poursuivi
tous les conflits et confrontations hérités de l'administration Biden
précédente dans sa quête de primauté mondiale, y compris la guerre par
procuration des États-Unis en Ukraine contre la Russie, une
confrontation avec l'Iran qui a dégénéré en guerre ouverte en juin
dernier, et l'expansion continue de l'empreinte militaire américaine
dans la région Asie-Pacifique le long de la périphérie de la Chine et
même à l'intérieur de ses frontières sur la province insulaire de
Taïwan.
La politique américaine à l’égard de la Russie est décrite en détail dans le document de 2019 de la RAND Corporation intitulé « Étendre la Russie : concurrencer sur un terrain avantageux ».
Le document énumère des mesures économiques, notamment « entraver les exportations de pétrole », « réduire les exportations de gaz naturel et entraver l’expansion des pipelines » et « imposer des sanctions »,
des mesures qui avaient été mises en œuvre par les États-Unis au moment
de la publication du document et depuis lors, y compris sous la
première administration Trump, l’administration Biden qui a suivi et
maintenant pendant le deuxième mandat du président Trump.
Les mesures géopolitiques énumérées par le document de la RAND comprenaient « fournir une aide mortelle à l'Ukraine », qui a commencé sous la première administration Trump, « accroître le soutien aux rebelles syriens », qui s'est manifesté à la fin de l'année dernière par le renversement réussi du gouvernement syrien par les États-Unis, « promouvoir un changement de régime en Biélorussie », que la Russie a jusqu'à présent neutralisé avec succès , et « exploiter les tensions dans le Caucase du Sud », qui se déroule actuellement sous l'administration Trump sous la forme d' un bail de 99 ans sur un territoire plaçant potentiellement des troupes américaines le long des frontières de la Russie et de l'Iran.
Ensemble,
ces politiques représentent une tentative continue des États-Unis
d’encercler, de contenir, de saper et d’étendre la Fédération de Russie,
cherchant finalement à précipiter un effondrement de type Union
soviétique, même si les États-Unis feignent un intérêt pour la « paix » avec la Russie en Ukraine.
Comme dans le passé, ainsi dans le futur
Indépendamment
des revers et des limites, tant que les États-Unis continueront de
rechercher la primauté sur les nations du monde plutôt qu’une
coopération constructive avec elles, toute ouverture américaine de « paix » avec des nations qu’ils ont qualifiées d’« adversaires » et de « menaces »
représente un modèle établi de pause, de réorganisation, de réarmement
et de relance des hostilités – et non un véritable changement de
politique.
L'exemple
le plus récent est la guerre de changement de régime menée par les
États-Unis en Syrie. Suite à l'intervention russe en 2015, la guerre a
été interrompue. Les États-Unis ont profité de cette pause pour réarmer
et réorganiser leurs alliés en Syrie et dans ses environs, tandis que
les alliés de la Syrie, la Russie et l'Iran, étaient entraînés dans une
série de conflits coûteux ailleurs. Une fois la Russie et l'Iran
suffisamment étendus, les États-Unis ont relancé les combats fin 2024,
renversant rapidement et avec succès le gouvernement syrien.
L’effondrement
de la Syrie a été suivi par des opérations militaires
américano-israéliennes menées contre l’Iran lui-même, combinées à une
campagne toujours en cours visant à éliminer ce qui reste des alliés de
l’Iran au Liban, en Irak et au Yémen.
Une
pause dans la guerre par procuration menée par Washington contre la
Russie en Ukraine ne fera que déplacer les efforts américains ailleurs.
Comme
l'a expliqué le secrétaire Hegseth en février, toute pause
s'accompagnerait de l'occupation de l'Ukraine par les troupes
européennes, à l'instar des États-Unis et de la Turquie en Syrie. Elle
inclurait également le réarmement
et la réorganisation de l'armée ukrainienne – comme cela a été
spécifiquement mentionné lors de la récente réunion
américano-européenne-ukrainienne à Washington – et la reprise des
hostilités ultérieurement, lorsque les circonstances pencheraient en
faveur de Washington.
Non seulement c’est ce qu’impliquent les déclarations du secrétaire Hegseth concernant une « division du travail » et un « séquençage stratégique » , mais c’est aussi ce que les États-Unis ont fait tout au long de la guerre froide et depuis lors.
Sous l'administration Bush Jr., il est admis
que les États-Unis ont cherché à instaurer des changements de régime
dans plusieurs pays d'Europe de l'Est, ainsi qu'en Géorgie, dans le
Caucase. En 2003, les États-Unis ont renversé avec succès le
gouvernement géorgien, tout comme ils l'ont fait avec le gouvernement
ukrainien en 2014. Tout comme en Ukraine, les États-Unis ont entrepris
de réorganiser et de renforcer l'armée géorgienne et, en 2008, comme l'a conclu une enquête de l'UE , la Géorgie a lancé une courte guerre, qui a échoué, contre les forces russes.
L’année suivante, sous l’administration Obama, les États-Unis ont cherché à « réinitialiser
» les relations américano-russes, la secrétaire d’État américaine de
l’époque, Hillary Clinton, présentant littéralement au ministre russe
des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, un bouton physique de « réinitialisation » comme symbole de la nouvelle relation.
En
réalité, les États-Unis ont simplement cherché du temps et de l’espace
pour préparer la prochaine série de provocations – ce qu’ils ont fait – à
partir de 2011, en divisant et en détruisant une grande partie du monde
arabe, y compris en ciblant les alliés russes, la Libye et la Syrie, et
le renversement réussi du gouvernement ukrainien en 2014, ainsi que le «
pivot vers l’Asie » des États-Unis qui a commencé sous l’administration
Obama et se poursuit encore aujourd’hui.
Non
seulement les récentes politiques américaines semblent représenter le
dernier exemple de ce cycle de recherche de la paix tout en se préparant
à la prochaine série de confrontations, mais les États-Unis ont
pratiquement déclaré que le gel du conflit en Ukraine visait à leur
donner le temps et l’espace nécessaires pour donner la priorité à la
maîtrise de la Chine, ce qui implique que les États-Unis reviendront
ensuite contrarier la Russie en Ukraine.
Seul
le temps nous dira dans quelle mesure la Russie s’accommodera ou
perturbera les tentatives des États-Unis de mettre en œuvre une « division du travail » concernant l’Ukraine pour effectuer un processus de « séquençage stratégique »
pour vaincre la Russie, la Chine et leurs alliés en détail, et si le
reste du monde multipolaire s’unira suffisamment pour aider la Russie ou
se laissera diviser et distraire par des efforts américains similaires
pour perturber et déstabiliser leurs nations respectives.
Le
calcul de la Russie sera basé soit sur sa confiance dans la poursuite
de l'Opération militaire spéciale (OMS) jusqu'à sa conclusion complète,
en faisant s'effondrer l'armée ukrainienne et en supprimant le régime
client installé par les États-Unis à Kiev à partir de 2014, soit sur la
nécessité d'accepter une pause dont Moscou estime pouvoir faire un
meilleur usage que l'Occident collectif et affronter les États-Unis et
ses mandataires à l'avenir à partir d'une position encore plus forte.
Il se peut que la Russie cherche à libérer des ressources pour son propre « pivot »
visant à aider des alliés comme l'Iran et la Chine, tandis que les
États-Unis eux-mêmes tournent leur attention vers l'Est. Cependant,
contrairement aux États-Unis, la Russie ne dispose pas de la longue
liste d'États clients qu'elle pourrait mobiliser pour gérer un conflit
tout en se tournant vers l'autre, comme Washington le fait et le fait.
L’avenir
du monde multipolaire dépendra peut-être autant de l’aide apportée aux
nations pour empêcher leur capture et leur exploitation politiques par
les États-Unis que de la coopération entre les nations multipolaires
pour se défendre contre l’empiètement, la coercition et la capture des
États-Unis.
Le
test ultime pour la Russie et le monde multipolaire émergent ne réside
pas seulement dans leur capacité à résister aux visées américaines
dirigées contre chacun d'eux individuellement, mais aussi dans leur
capacité à retourner cette stratégie contre Washington. Si la Russie
parvient à conclure son OMS en Ukraine de manière décisive tout en
renforçant ses alliances avec des pays comme la Chine et l'Iran, elle
peut rendre la « division du travail » inutile.
De
même, si la Chine peut utiliser cette période pour consolider son
influence régionale et approfondir ses liens avec des nations
extérieures à l’Occident collectif, les États-Unis trouveront leur pivot
vers l’Asie-Pacifique beaucoup moins efficace.
Le
paysage géopolitique actuel est une partie d'échecs géopolitique aux
enjeux considérables. Si les États-Unis croient pouvoir acculer leurs
rivaux un par un, un échec et mat coordonné du monde multipolaire
pourrait mettre fin à la partie pour de bon. Le succès signifie un monde
défini par la paix, la stabilité et la prospérité dans un équilibre
mondial des pouvoirs. L'échec signifie la perte de notre avenir
collectif au profit d'une poignée d'intérêts particuliers aux États-Unis
qui ont déjà démontré depuis un siècle les moyens et la volonté de le
détruire.
Brian Berleticest un chercheur et écrivain géopolitique basé à Bangkok.
RFE/RL - After Meeting Russian Foreign Minister, Clinton Hails Fresh Start (2009): https://www.rferl.org/a/After_Meeting... Reuters - Georgia started war with Russia: EU-backed report (2009):