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mardi 7 octobre 2025

"Dépaysement"/ situationnistes et surréalistes

Le dépaysement se nourrit de repaysements (par une procédure de collage)... c'est l'histoire de la psychogéographie, mais à raconter plus tard.

 

 Ivan Chtcheglov/

"L’activité principale des habitants sera la DERIVE CONTINUE. Le changement de paysage d’heure en heure sera responsable du dépaysement complet." (Formulaire pour un urbanisme nouveau, 1953) 

Guy Debord/

"IL FAUT ABOUTIR À UN DEPAYSEMENT PAR L'URBANISME, à un urbanisme non utilitaire, ou plus exactement conçu en fonction d’une autre utilisation." (Manifeste pour une construction de situations, 1953)

"Mais enfin l'usage des taxis, par exemple, peut fournir une ligne de partage assez claire : si dans le cours d'une dérive on prend un taxi, soit pour une destination précise, soit pour se déplacer de vingt minutes vers l'ouest, c'est que l'on s'attache surtout au dépaysement personnel." (Théorie de la dérive, 1956)

 Ralph Rumney/

"La psychogéographie se préoccupe du rapport entre les quartiers et les états d’âmes qu’ils provoquent. Venise, comme Amsterdam et le Paris d’antan, se prête à plusieurs possibilités de dépaysement." (Le Consul, 1999)

 Louis Aragon/

"Ce qui caractérise le miracle, ce qui fait crier au miracle, cette qualité du merveilleux, est sans doute un peu la surprise, comme on a voulu faiblement le signaler. Mais c'est bien plus, dans tous les sens qu'on peut donner à ce mot, un extraordinaire dépaysement." (La peinture au défi, 1930) 

André Breton/

 "La surréalité sera d'ailleurs fonction de notre volonté de dépaysement complet de tout (et il est bien entendu qu'on peut aller jusqu'à dépayser une main en l'isolant d'un bras, que cette main y gane en tant que main, et aussi qu'en parlant de dépaysement, nous ne pensons pas seulement à la possibilité d'agir dans l'espace)." (Avis au lecteur pour La Femme 100 têtes de Max Ernst, 1929)

"Nous ne voyions alors dans le cinéma, quel qu'il fût, que substance lyrique exigeant d'être brassée en masse et au hasard. Je crois que ce que nous mettions au plus haut en lui, au point de nous désintéresser de tout le reste, c'était son pouvoir de dépaysement." (Comme dans un bois, 1951)

 

 

Max ERNST, 
Au-dessus des nuages, marche la Minuit. 
Au-dessus de la Minuit, plane l'oiseau invisible du jour. 
Un peu plus haut que l'oiseau, l'éther pousse et les toîts flottent
Collage, 1920.

dimanche 5 octobre 2025

Extraits de "Comme dans un bois" (André Breton, 1951)

 Quand j’avais « l’âge du cinéma » (il faut bien reconnaître que dans la vie cet âge existe - et qu'il passe) je ne commençais pas par consulter le programme de la semaine pour savoir quel film avait chance d’être le meilleur et pas davantage je ne m’informais de l’heure à laquelle tel film commençait. Je m’entendais très spécialement avec Jacques Vaché pour n’apprécier rien tant que l’irruption dans une salle où l’on donnait ce que l’on donnait, où l’on en était n’importe où et d’où nous sortions à la première approche d’ennui – de satiété – pour nous porter précipitamment vers une autre salle où nous nous comportions de même, et ainsi de suite (évidemment ce serait trop grand luxe aujourd'hui). Je n’ai jamais rien connu de plus magnétisant : il va sans dire que le plus souvent nous quittions nos fauteuils sans même savoir le titre du film, qui ne nous importait d'aucune manière. Quelques heures du dimanche suffisaient à épuiser ce qui s’offrait à Nantes : l’important est qu’on sortait de là « chargé » pour quelques jours, sans qu’entre nous il y eût là rien de délibéré, les jugements qualitatifs étaient bannis. [...] 

Nous ne voyions alors dans le cinéma, quel qu'il fût, que substance lyrique exigeant d'être brassée en masse et au hasard. Je crois que ce que nous mettions au plus haut en lui, au point de nous désintéresser de tout le reste, c'était son pouvoir de dépaysement.

Ce dépaysement est à plusieurs étages, je veux dire admet différents paliers. La merveille, auprès de quoi le mérite d'un film déterminé est peu de chose, réside dans la faculté dévolue au premier venu de s'abstraire de sa propre vie quand le cœur lui en dit, au moins dans les grandes villes, sitôt franchie une de ces portes amorties qui donnent dans le noir. De l'instant où il a pris place jusqu'à celui où il glisse dans la fiction qui se déroule sous ses yeux, il passe par un point critique aussi captivant et insaisissable que celui qui unit la veille au sommeil (le livre et même la pièce de théâtre sont incomparablement plus lents à produire le déclic). Le spectateur solitaire que j'ai en vue, perdu au milieu de ses inconnus sans visages, d'où vient que sur le champ il épouse avec eux cette aventure qui n'est ni la sienne ni la leur? Quelles radiations, quelles ondes qui ne défieraient peut-être pas tout tracé permettent cet unisson? On rêve de ce qui pourrait s'entreprendre à la faveur de cette constellation, tant qu'elle dure... Il est une manière d'aller au cinéma comme d'autres vont à l'église et je pense que, sous un certain angle, tout à fait indépendamment de ce qui s'y donne, c'est là que se célèbre le seul mystère absolument moderne. […]

(« Ce qui donne la Clé d'Ouverture, c'est le Sens de la Nuit dévoilé. Il n'y a pas d'autre clé, et il ne peut y en avoir. Car le Secret de Réussite consiste uniquement à briser les antinomies. Et seule la Nuit a ce pouvoir. » Le cinéma est le premier pont grand ouvert qui relie le « jour » à cette Nuit.)


André Breton, «Comme dans un bois», L'âge du cinéma, n° 4/5 (spécial surréaliste), août-novembre 1951, pp. 27-29. 

mercredi 28 août 2024

Congrès international pour la détermination des directives et la défense de l'esprit moderne (Congrès de Paris de 1921)

 

Au mois de mars prochain s'ouvre, à Paris, un congrès international pour la détermination des directives et la défense de l'esprit moderne. Tous ceux qui tentent, aujourd'hui, dans le domaine de l'art, de la science ou de la vie, un effort neuf et désintéressé, sont conviés à y prendre part. Il s'agit avant tout d'opposer à une certaine formule de dévotion au passé — il est question constamment de la nécessité d'un prétendu retour à la tradition — l'expression d'une volonté, qui porte à agir avec le minimum de références.
La part de la vérité n'est certes plus à faire dans les arguments que peuvent invoquer en leur faveur les représentants de l'une et de l'autre tendances. Il est, par contre, permis de dire que l'attitude des premiers, s'appuyant sur une doctrine des plus strictes et se posant, on ne sait pourquoi, en gardiens de l'ordre, menacerait gravement le liberté des seconds, livrés par définition à des entreprises hasardeuses et fréquemment contradictoires, si ces derniers ne se renouvelaient sans cesse ou s'ils n'étaient renouvelés. Les uns gagneront donc à être instruits de notre projet. Aux autres, nous demandons de faire abstraction de leur ambition particulière et de nous adresser leur adhésion.
Les membres du comité d'organisation, au nombre de sept, professent des idées trop diverses pour qu'on puisse les suspecter de s'entendre afin de limiter l'esprit moderne au profit de quelques-uns ; leurs dissensions sont publiques. Le malentendu qui règne entre eux répond de leur impartialité au sein du Congrès ; il laisse cependant subsister le minimum d'accord indispensable pour ne pas paralyser la tentative.

Georges Auric, compositeur ; André Breton, directeur de Littérature ; Robert Delaunay, artiste-peintre ; Fernand Léger, artiste-peintre ; Amédée Ozenfant, directeur de l'Esprit Nouveau ; Jean Paulhan, secrétaire de la Nouvelle Revue Française ; Roger Vitrac, directeur d'Aventure.

Lire le texte original paru dans la NRf de février 1921


A propos du congrès, on pourra lire le « congrès de Paris », Chapitre XX de Dada à Paris, par Michel Sanouillet.

La plus importante réunion de documents concernant le « congrès de Paris » se trouve dans un dossier établi par les soins d’André Breton et acquis par la Bibliothèque nationale (NAF 14316) : il contient une quarantaine de lettres, articles et textes divers. Des extraits en ont été publiés par Tzara dans Les Feuilles libres, bibl. 699, avril-mai 1922. Voir le commentaire détaillé dans le catalogue Nicaise 1960 (bibl. 753, p. 247-250) et dans le catalogue de la vente Gaffé (bibl. 744, n° 73). Il importait toutefois de rétablir l’équilibre, rompu dans ce dossier en faveur de la thèse Breton, en explorant d’autres collections, comme celle du fonds Tzara à la B.L.J.D. qui renferme des documents d’un intérêt considérable.

dimanche 28 juillet 2024

Hommage à G. Aubourg à l'occasion de la présentation d'Enfin André Breton vint en Haïti...



HOMMAGE, CONFÉRENCE DÉBAT,

avec Maguet Delva et Jean-Marie Theodat

Un devoir s’impose à tous les honnêtes gens : ne jamais oublier ceux qui ont résisté́ et combattu le « fascisme ». Il faut se souvenir de ces hommes et de ces femmes qui, par leurs pensées, leurs idées, leurs paroles et leurs actes ont lutté contre l’horreur duvaliériste. Ces hommes, ces femmes avaient une famille. Ils avaient des qualités, des qualités de cœur et d’esprit. Le Dr François Duvalier et ses ministres, associés à une élite apatride et prédatrice, les ont massacrés. Ce faisant, ils ont détruit les forces vives du pays, celles qui devaient en être les forces productives. Il faut savoir que certains de ces hommes et de ces femmes étaient des gens de lettres connus, écrivains, poètes, romanciers, journalistes de talent. D’autres étaient des artisans consciencieux, des spécialistes appréciés dans leur domaine de compétence.

Tous massacrés !

Gérard Aubourg, né à Port-au-Prince, a passé son enfance et son adolescence à Haïti, rue des Casernes. Il a fait ses études primaires à l’École Smith Duplessis et ses études secondaires au Lycée Alexandre Pétion. Diplômé de l’École normale supérieure de Port-au-Prince, il part à Paris en 1965. Il s’inscrit à la Sorbonne : licencié en sociologie, et en Droit des affaires, il obtient son doctorat en histoire économique sous la direction du Professeur Pierre Vilar. Professeur de sciences économiques et sociales, il a enseigné dans les lycées des Académies de Créteil, de Versailles et de Paris.