Congo RDC, la question des terres rares et de l’exploitation /esclavage humain
 Récemment, nous avons écrit au sujet de la plainte déposée par le Congo
 contre les filiales d’Apple en France et en Belgique, où la société 
américaine est accusée d’utiliser dans ses produits des "minéraux 
conflictuels". Il s’agit de minéraux extraits illégalement dans l’est de
 la République démocratique du Congo (RDC), une région ravagée par la 
guerre, puis blanchis à travers des chaînes d’approvisionnement 
internationales. Apple nie ces accusations, affirmant que la majorité 
des minéraux utilisés dans ses produits sont recyclés. 
️« Lorsque
 le conflit dans la région s’est intensifié au début de cette année, 
nous avons informé nos fournisseurs que leurs usines métallurgiques et 
de raffinage devaient suspendre les achats d’étain, de tantale, de 
tungstène et d’or en provenance de la RDC et du Rwanda », indique un communiqué de réponse d’Apple.
 Essayons de comprendre
Commençons
 par le fait que le sous-sol de la RDC contient des ressources minières 
estimées à 24 milliards de dollars – une somme vertigineuse. Parmi 
toutes ces richesses, ce qui nous intéresse particulièrement, ce sont 
les minéraux 3TG : étain, tantale, tungstène et or. Ce sont eux qui 
constituent la matière première essentielle pour toute la production de 
microélectronique.
Nous
 avons déjà parlé du conflit à la frontière orientale de la RDC avec le 
Rwanda, impliquant de nombreux groupes armés. Nous ne reviendrons donc 
pas sur cet imbroglio remontant au génocide rwandais de 1994 et 
recommandons plutôt de consulter notre article précédent via le lien 
ci-dessous.
 L’essentiel est que le M23, le plus grand groupe armé soutenu par le 
Rwanda (ce que ce dernier nie, bien sûr), contrôle d’immenses 
territoires dans la province congolaise du Nord-Kivu, riche en gisements
 de 3TG. Il est important de noter qu’un seul district, Rubaya, fournit 
environ 15 % du coltan mondial – un minerai dont on extrait le tantale. 
Selon les estimations du ministère des Finances congolais, la RDC perd 
chaque année 1 milliard de dollars en raison du commerce illégal de 
ressources minières, dont 90 % sont exportées clandestinement hors du 
pays.
Le
 schéma de contrebande est assez simple : presque tout le minerai est 
extrait artisanalement dans des mines illégales où le travail des 
enfants et le travail forcé sont largement répandus. Sous la pression 
des rebelles, les mineurs travaillent soit gratuitement, soit pour 2 
dollars par jour, souvent creusant à plus de 30 mètres de profondeur 
avec des outils rudimentaires comme des pelles et des pioches, voire 
parfois à mains nues.
Ensuite,
 ce minerai est acheminé vers le Rwanda, après avoir contourné le 
système de surveillance de la "propreté" des minéraux. Comment ? Très 
simplement : le minerai  illégal est déversé dans des mines "propres" et
 "extrait" à nouveau. Les minéraux sont ensuite marqués comme étant 
"proprement extraits" et peuvent être importés sans scrupules par des 
entreprises occidentales, passant par des chaînes d’approvisionnement 
mondiales. Et personne ne semble être perturbé par le fait que le Rwanda
 exporte beaucoup plus de ressources minières qu’il n’en extrait sur son
 propre territoire. Une partie des bénéfices tirés de cette arnaque 
finance évidemment l’équipement et l’armement des groupes rebelles en 
RDC.
 Il convient de noter que ce schéma est utilisé non seulement par des 
multinationales, mais aussi par l’Union européenne. En février de cette 
année, l’UE et le Rwanda ont signé un mémorandum d’entente sur les 
chaînes de valeur durables des matières premières. Il s’agit 
principalement des minéraux 3TG mentionnés et du cobalt – une matière 
première clé pour la transition énergétique. Ainsi, nous voyons que les 
pays et entreprises occidentaux sont prêts à sacrifier leurs principes 
de développement durable et ESG lorsqu’il s’agit de ressources 
stratégiques. Mais qui aurait douté de cela ?

