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jeudi 24 avril 2025

Où RSF opère un retrait posthume de leur carte professionnelle aux journalistes palestiniens

 

Reporters Sans Frontières (RSF) a toutes les audaces, tous les culots. Les « salauds ça ose tout, c’est à ça qu’on les reconnaît ». L’assertion du type Bernard Blier marche pour eux en changeant le premier mot. Voilà une « ONG » qui n’en est pas une, puisqu’elle a avec constance touché de l’argent des USA et d’Israël, voilà qu’en novembre, dans son « Bilan Annuel de la liberté de la presse dans le monde », elle refuse de compter les journalistes assassinés par Israël à Gaza ! En effet pour RSF les martyrs de presse Palestiniens ne sont pas de « vrais journalistes ». Du type Robert Ménard.

Et voilà qu’aujourd’hui, à Paris et à Marseille, cette OG (organisation Gouvernementale) rejoint l’appel d’une cohorte d’honnêtes gens pour protester contre les crimes israéliens commis contre les journalistes à Gaza ! Faut vraiment être culotté.

Nous avons eu la preuve par Trump que RSF est un mistigri piloté par les US : RSF a protesté contre la coupure des crédits exigée par le blondinet qui règne à la Maison Blanche. Cette pleurnicherie était un aveu, Washington ne verse plus de sous aux héritiers de Ménard ce qui « met en danger la liberté de la presse ». Disent-ils. Il faut entendre ou lire ce paradoxe pour le croire. Donc, puisque Trump garde ses sous, la puce change d’âne et RSF entend taper la caisse de l’Europe (qui lui verse déjà un million d’euro par an).

Résumons. RSF a vécu de l’argent américain et israélien, et un peu des largesse de Bongo. En Echange RSF a toujours très bien classé Israël dans son « Palmarès mondial de la démocratie », et tant pis pour les journalistes Palestiniens, et quelques occidentaux, assassinés par Tel Aviv. Miracle et nouveau marketing, cette engeance que Macron à naguère nommée pour assurer la police au sein de la presse, s’en vient pleureur sur Gaza. Ménard reviens ils sont devenus fous !

ARTICLE EN INTÉGRALITÉ

Palantir: the new deep state


 

mardi 18 mars 2025

Lattaquié - Butcha, comparaison de l’information

 Contexte "spectaculaire" à la mi-mars 2025 au Proche-orient:

En quelques jours 7000 personnes ont été tuées en Syrie par les égorgeurs inclusifs. Que répond Bruxelles? Lundi 17 mars, le coeur du jardin mondial des saints herbivores européens versus la jungle de carnivores du monde extérieur (pour reprendre les éléments de langage de Josep Borrell, Haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères de 2019 à 2024) annonce un aide de 2.500 millions d'euros pour l'égorgeur en chef (qui sait bien tailler sa barbe et mettre une cravate, pas comme Zelenski!). De quoi le tenir en laisse tout en lui lâchant suffisament la bride pour continuer.

Israel vient aujourd'hui d'assassiner 400 palestiniens, visés dans leurs voitures, tirés comme des lapins. Hier, l'US army faisait de même au Yemen (depuis le Quatar): 50 femmes et enfants versus missiles.

🇺🇦⚡🇸🇾

🔸Sur l'exemple de Lattaquié, on peut voir à quoi ressemblent les véritables massacres de masse à l'ère de l'hyper-information : tout est pratiquement en direct, et un jour ou deux plus tard, on trouve des centaines de photos et de vidéos de cadavres défigurés et de rivières de sang.

🔸Et ce, alors que les djihadistes contrôlent Lattaquié.

🔸Comparez avec Bucha : les informations indiquant qu'il s'y passait quelque chose ont commencé à arriver seulement deux ou trois jours après l'entrée des FAU dans la ville.

🔸Une semaine plus tard, les premières vidéos obscures, des photos fragmentaires, avec des cadavres anonymes soigneusement disposés, sans visages visibles.

🔸La situation en 2025 est la suivante : Les bases militaires russes abritent des citoyens syriens qui sont tués par des djihadistes soutenus par l'UE en raison de leurs croyances religieuses ou appartenance ethnique.



PS: la mission d'enquête de gendarmes français dépêchée à Butcha n'a toujours pas remis son rapport sur le dit "massacre" qui occasionna la rupture des négociations de paix entre ukrainiens (un des négociateurs reçut à une balle dans la tête, trop pro-russe) et russes en avril 2023, après que Boris Johnson vint mettre son grain de sel pour les faire capoter.

dimanche 16 mars 2025

Des soldats israéliens admettent écraser des Palestiniens morts ou vivants avec leurs bulldozers, selon CNN

 SOURCE: https://www.les-crises.fr/des-soldats-israeliens-admettent-ecraser-des-palestiniens-morts-ou-vivants-avec-leurs-bulldozers-selon-cnn/

Le réserviste de l’armée israélienne est revenu différent, traumatisé par ce qu’il avait vu dans la guerre contre le Hamas dans la bande de Gaza, a déclaré sa famille à CNN. Six mois après avoir été envoyé au combat, il luttait contre le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) une fois rentré chez lui. Avant son redéploiement, il s’est suicidé. « Il est sorti de Gaza, mais Gaza n’est pas sortie de lui. Et il en est mort, à cause du post-traumatisme », a déclaré sa mère, Jenny Mizrahi.

Source : CNN, Nadeen Ebrahim, Mike Schwartz
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Eliran Mizrahi, qui s’est suicidé en juin, photographié à Gaza. Famille d’Eliran Mizrachi

Note de la rédaction : cette histoire contient des détails sur le suicide et la violence qui pourraient déranger certains lecteurs.

Tel Aviv et Ma’ale Adumim (CNN) – Eliran Mizrahi, 40 ans et père de quatre enfants, a été déployé à Gaza après l’attaque meurtrière du Hamas contre Israël, le 7 octobre 2023. Le réserviste de l’armée israélienne est revenu différent, traumatisé par ce qu’il avait vu dans la guerre contre le Hamas dans la bande de Gaza, a déclaré sa famille à CNN. Six mois après avoir été envoyé au combat, il luttait contre le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) une fois rentré chez lui. Avant son redéploiement, il s’est suicidé. « Il est sorti de Gaza, mais Gaza n’est pas sortie de lui. Et il en est mort, à cause du post-traumatisme », a déclaré sa mère, Jenny Mizrahi.

L’armée israélienne a déclaré qu’elle fournissait des soins à des milliers de soldats souffrant de SSPT ou de maladies mentales causées par les traumatismes subis pendant la guerre. Le nombre de ceux qui se sont suicidés n’est pas clair, car les Forces de défense israéliennes (FDI) n’ont pas fourni de chiffres officiels.

La tombe d’Eliran Mizrahi est ornée de fleurs et du drapeau israélien lors de son enterrement militaire à Jérusalem le 13 juin 2024. Famille d’Eliran Mizrachi

Un an après, la guerre d’Israël à Gaza a fait plus de 42 000 morts, selon le ministère de la santé de la bande de Gaza, et les Nations unies signalent que la plupart des morts sont des femmes et des enfants.

La guerre, lancée après que le Hamas a tué 1 200 personnes et en a pris plus de 250 en otage, est déjà la plus longue qu’ait connue Israël depuis la création de l’État juif. Alors qu’elle s’étend désormais au Liban, certains soldats disent redouter d’être enrôlés dans un nouveau conflit.

« Beaucoup d’entre nous ont très peur d’être à nouveau enrôlés dans une guerre au Liban », a déclaré à CNN un infirmier des FDI qui a servi quatre mois à Gaza, sous le couvert de l’anonymat en raison du caractère sensible de la question. « Beaucoup d’entre nous ne font pas confiance au gouvernement en ce moment. »

À de rares exceptions près, les autorités israéliennes ont interdit l’accès à Gaza aux journalistes étrangers, à moins qu’ils ne soient escortés par les FDI. Il est donc difficile de rendre compte de l’ampleur des souffrances des Palestiniens ou de l’expérience des soldats sur place. Les soldats israéliens qui ont combattu dans l’enclave ont déclaré à CNN qu’ils ont été témoins d’horreurs que le monde extérieur ne pourra jamais vraiment comprendre. Leurs récits offrent un rare aperçu de la brutalité de ce que les critiques ont appelé la « guerre éternelle » du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, et du tribut intangible qu’elle prélève sur les soldats qui y participent.

Pour de nombreux soldats, la guerre à Gaza est une lutte pour la survie d’Israël et doit être gagnée par tous les moyens. Mais cette bataille a également des conséquences psychologiques qui, en raison de la stigmatisation, restent largement cachées. Des entretiens avec des soldats israéliens, un médecin et la famille de Mizrahi, le réserviste qui s’est suicidé, permettent de comprendre le fardeau psychologique que la guerre fait peser sur la société israélienne.

Le bilan en matière de santé mentale

Mizrahi a été déployé à Gaza le 8 octobre de l’année dernière et a été chargé de conduire un bulldozer D-9, un véhicule blindé de 62 tonnes qui peut résister aux balles et aux explosifs.

Il a passé la majeure partie de sa vie dans la vie civile, travaillant comme directeur dans une entreprise de construction israélienne. Après avoir été témoin des massacres commis par le Hamas, il a ressenti le besoin de se battre, a déclaré Jenny à CNN.

Le réserviste a passé 186 jours dans l’enclave jusqu’à ce qu’il soit blessé au genou et qu’il subisse des lésions auditives en février lorsqu’une grenade propulsée par une roquette (RPG) a touché son véhicule, a indiqué sa famille. Il a été retiré de Gaza pour être soigné et, en avril, on lui a diagnostiqué un syndrome de stress post-traumatique, pour lequel il suit une thérapie hebdomadaire.

Son traitement n’a rien donné.

« Ils ne savaient pas comment les traiter (les soldats) », a déclaré Jenny, qui vit dans la colonie israélienne de Ma’ale Adumim, en Cisjordanie occupée. « Ils (les soldats) ont dit que la guerre était très différente. Ils ont vu des choses qui n’ont jamais été vues en Israël. »

Lorsque Mizrahi était en permission, il souffrait d’accès de colère, de transpiration, d’insomnie et de retrait social, a déclaré sa famille. Il disait à sa famille que seuls ceux qui étaient à Gaza avec lui pouvaient comprendre ce qu’il vivait.

« Il disait toujours que personne ne comprendrait ce que j’ai vu », a déclaré sa sœur, Shir, à CNN.

Jenny se demande si son fils a tué quelqu’un et s’il n’a pas pu le supporter.

Des Palestiniens déplacés marchent sur un chemin de terre bordé de décombres de bâtiments dans le quartier Shejaiya de la ville de Gaza, le 7 octobre 2024. Omar Al-Qattaa/AFP/Getty Images

« Il a vu beaucoup de gens mourir. Il a peut-être même tué quelqu’un. (Mais) nous n’apprenons pas à nos enfants à faire ce genre de choses », a-t-elle déclaré. « Alors, quand il a fait ça, quelque chose comme ça, peut-être que ça a été un choc pour lui. »

Guy Zaken, l’ami de Mizrahi et copilote du bulldozer, a apporté des précisions sur leur expérience à Gaza. « Nous avons vu des choses très, très, très difficiles », a déclaré M. Zaken à CNN. « Des choses difficiles à accepter. »

L’ancien soldat a parlé publiquement des traumatismes psychologiques subis par les troupes israéliennes à Gaza. Lors d’un témoignage devant la Knesset, le parlement israélien, en juin, Zaken a déclaré qu’à de nombreuses reprises, les soldats ont dû « écraser des terroristes, morts ou vivants, par centaines. »

« Tout gicle », a-t-il ajouté.

Zaken dit qu’il ne peut plus manger de viande, car cela lui rappelle les scènes horribles dont il a été témoin depuis son bulldozer à Gaza, et qu’il a du mal à dormir la nuit, le bruit des explosions résonnant dans sa tête.

« Lorsque vous voyez beaucoup de viande à l’extérieur, et du sang… à la fois le nôtre et le leur (Hamas), cela vous affecte vraiment lorsque vous mangez », a-t-il déclaré à CNN, faisant référence aux corps comme à de la « viande. »

Il affirme que la grande majorité des personnes qu’il a rencontrées étaient des « terroristes. »

« Les civils que nous avons vus, nous les avons arrêtés et leur avons apporté de l’eau à boire, et nous les avons laissés manger de notre nourriture », a-t-il rappelé, ajoutant que même dans de telles situations, les combattants du Hamas leur tiraient dessus.

« Il n’y a donc pas de citoyens », a-t-il déclaré, faisant référence à la capacité des combattants du Hamas à se fondre dans la population civile. « C’est du terrorisme. »

Cependant, lorsque les soldats rencontrent des civils, beaucoup sont confrontés à un dilemme moral, selon l’infirmier des FDI qui a parlé à CNN sous le couvert de l’anonymat.

Les soldats israéliens avaient une « attitude collective très forte » de méfiance à l’égard des Palestiniens de Gaza, en particulier au début de la guerre, a déclaré l’infirmier.

Il y avait l’idée que les habitants de Gaza, y compris les civils, « sont mauvais, qu’ils soutiennent le Hamas, qu’ils aident le Hamas, qu’ils cachent des munitions », a déclaré l’infirmier.

Sur le terrain, cependant, certaines de ces attitudes ont changé « lorsque l’on a des civils gazaouis sous nos yeux », ont-ils déclaré.

Les FDI ont déclaré qu’elles faisaient tout leur possible pour minimiser les pertes civiles à Gaza, notamment en envoyant des messages textuels, en passant des appels téléphoniques et en larguant des tracts d’évacuation pour avertir les civils avant les attaques.

Malgré cela, les civils de Gaza ont été tués à plusieurs reprises et en grand nombre, y compris lorsqu’ils s’abritaient dans des zones que l’armée a elle-même désignées comme des « zones de sécurité. »

Le bilan en matière de santé mentale à Gaza risque d’être énorme. Les organisations humanitaires et les Nations unies ont souligné à plusieurs reprises les conséquences catastrophiques de la guerre sur la santé mentale des civils de Gaza, dont beaucoup avaient déjà été marqués par un blocus de 17 ans et plusieurs guerres avec Israël. Dans un rapport publié en août, les Nations unies ont déclaré que les expériences des habitants de Gaza défiaient « les définitions biomédicales traditionnelles des troubles de stress post-traumatique (TSPT), dans la mesure où dans le contexte de Gaza, le mot post de post-trumatique n’a pas le loisir d’exister.

Après que Mizrahi a mis fin à ses jours, des vidéos et des photos ont fait surface sur les médias sociaux montrant le réserviste en train de raser des maisons et des bâtiments à Gaza et posant devant des structures vandalisées. Certaines de ces images, qui auraient été postées sur ses comptes de médias sociaux aujourd’hui supprimés, sont visibles dans un documentaire au cours duquel il avait été interviewé sur la chaîne israélienne Channel 13.

Sa sœur, Shir, a déclaré avoir vu de nombreux commentaires sur les réseaux sociaux accusant Mizrahi d’être « un meurtrier », l’injuriant et réagissant par des émojis hostiles.

« C’était difficile », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle faisait de son mieux pour l’oublier. « Je sais qu’il avait bon cœur. »

Dégager les morts des débris

Ahron Bregman, politologue au King’s College de Londres, qui a servi dans l’armée israélienne pendant six ans, notamment lors de la guerre du Liban en 1982, a déclaré que la guerre de Gaza ne ressemble à aucune autre guerre menée par Israël.

« C’est très long », a-t-il dit, et c’est une zone urbaine, ce qui signifie que les soldats se battent au milieu de nombreuses personnes, « dont la grande majorité sont des civils. »

Les conducteurs de bulldozers font partie de ceux qui sont le plus directement exposés à la brutalité de la guerre, a déclaré M. Bregman. « Ce qu’ils voient, ce sont des morts, et ils les dégagent (avec) les débris », a-t-il déclaré à CNN. « Ils passent par dessus. »

Des femmes palestiniennes pleurent un parent tué lors d’un bombardement israélien sur la bande de Gaza, dans un hôpital de Deir al-Balah, le 22 mars 2024. Abdel Kareem Hana/AP

Pour beaucoup, la transition du champ de bataille à la vie civile peut être accablante, surtout après une guerre urbaine qui a entraîné la mort de femmes et d’enfants, a déclaré Bregman.

« Comment pouvez-vous mettre vos enfants au lit alors que vous avez vu des enfants tués à Gaza ? »

Malgré le syndrome de stress post-traumatique de Mizrahi, sa famille a déclaré qu’il avait accepté de retourner à Gaza lorsqu’il a été rappelé. Deux jours avant son redéploiement, il s’est suicidé.

Dans sa maison, Jenny a consacré une pièce à la mémoire de son fils décédé, avec des photos de son enfance et de son travail dans le bâtiment. Parmi les objets que sa mère a conservés figure la casquette que portait Mizrahi lorsqu’il s’est tiré une balle dans la tête, dont les impacts sont clairement visibles.

La famille de Mizrahi a commencé à parler de sa mort après que les Forces de défense israéliennes (FDI) lui ont refusé un enterrement militaire, arguant qu’il n’avait pas été « en service de réserve actif ». Elles sont ensuite revenues sur leur décision.

Eliran Mizrahi, enfant, dans un collage de photos encadré dans la maison familiale, en Cisjordanie occupée. Famille d’Eliran Mizrachi

Le journal israélien Haaretz a rapporté que 10 soldats ont mis fin à leurs jours entre le 7 octobre et le 11 mai, selon des données militaires obtenues par le journal.

Interrogé par CNN sur le nombre de suicides au sein des FDI depuis la guerre, Uzi Bechor, psychologue et commandant de l’unité de réponse au combat des FDI, a déclaré que le corps médical n’était pas autorisé à fournir un chiffre et que l’armée considérait que le taux de suicide n’avait pratiquement pas changé.

« Le taux de suicide dans l’armée est plus ou moins stable au cours des cinq ou six dernières années », a déclaré Bechor, précisant qu’il avait en fait diminué au cours des dix dernières années.

Même si le nombre de suicides est plus élevé, a-t-il dit, le ratio jusqu’à présent « est assez semblable à celui de l’année précédente parce que nous avons plus de soldats. »

« Cela ne signifie pas qu’il y a une tendance à l’augmentation des suicides », a déclaré Bechor à CNN.

Il n’a pas communiqué à CNN le nombre de suicides ni leur taux. « Chaque cas nous brise le cœur », a-t-il déclaré.

Pourtant, plus d’un tiers des soldats éloignés du combat souffrent de problèmes de santé mentale. Dans une déclaration faite en août, la division de réhabilitation du ministère israélien de la défense a indiqué que chaque mois, plus de 1 000 nouveaux soldats blessés sont rappelés des combats pour être soignés. 35 % d’entre eux se plaignent de leur état mental, et 27 % développent « une réaction mentale ou un syndrome de stress post-traumatique. »

Elle ajoute que d’ici la fin de l’année, 14 000 combattants blessés seront probablement admis pour être soignés, et qu’environ 40 % d’entre eux devraient être confrontés à des problèmes de santé mentale.

Plus de 500 personnes meurent par suicide en Israël et plus de 6 000 autres tentent de se suicider chaque année, selon le ministère de la santé du pays, qui note que « les chiffres mentionnés sont sous-estimés d’environ 23 %. »

En 2021, le suicide a été la principale cause de décès parmi les soldats de Tsahal, a rapporté le Times of Israel, citant des données militaires qui montrent qu’au moins 11 soldats ont mis fin à leurs jours cette année-là.

Au début de l’année, le ministère de la santé a cherché à « démentir les rumeurs d’augmentation des taux de suicide depuis le 7 octobre », affirmant que les cas signalés sont des « incidents isolés dans les médias et les réseaux sociaux ». Sans fournir de chiffres, le ministère a déclaré qu’il y avait eu une « diminution du nombre de suicides en Israël entre octobre et décembre par rapport aux mêmes mois de ces dernières années. »

M. Bregman, vétéran de la guerre du Liban, a déclaré qu’il était désormais plus facile de parler du syndrome de stress post-traumatique et d’autres problèmes de santé mentale que dans les années 1970 et 1980, grâce à la diminution de la stigmatisation. Néanmoins, il a ajouté que les soldats qui sortent de Gaza « porteront (leurs expériences) pour le reste de leur vie. »

L’infirmier des FDI qui a parlé à CNN a déclaré qu’un responsable de la santé mentale était désigné pour chaque unité de l’armée pendant et après le déploiement. L’impact de la guerre persiste néanmoins, a déclaré l’infirmier, avec des soldats aussi jeunes que 18 ans souffrant de traumatismes mentaux à Gaza. Ils pleuraient souvent ou semblaient émotionnellement engourdis, a ajouté l’infirmier.

Normaliser l’anormal

Bechor, le psychologue de Tsahal, a déclaré que l’un des moyens utilisés par l’armée pour aider les troupes traumatisées à reprendre leur vie est d’essayer de « normaliser » ce qu’elles ont vécu, en partie en leur rappelant les horreurs commises le 7 octobre.

« Cette situation n’est pas normale pour les êtres humains », a déclaré Bechor, ajoutant que lorsque les soldats reviennent du champ de bataille avec des symptômes de stress post-traumatique, ils se demandent : « Comment puis-je rentrer chez moi après ce que j’ai vu ? Comment puis-je m’engager avec mes enfants après ce que j’ai vu ? »

« Nous essayons de normaliser la situation et de les aider à se souvenir de leurs valeurs et des raisons pour lesquelles ils sont allés là-bas (à Gaza) », a-t-il déclaré à CNN.

Pour les dizaines de milliers d’Israéliens qui se sont portés volontaires ou qui ont été appelés à combattre, la guerre à Gaza a été perçue non seulement comme un acte d’autodéfense, mais aussi comme une bataille existentielle. Cette notion a été vantée par les principaux dirigeants politiques et militaires israéliens, ainsi que par les alliés internationaux d’Israël.

Des soldats portent le cercueil d’un capitaine israélien tué lors de combats dans le sud de la bande de Gaza, lors de ses funérailles à Beit Jann, Israël, le 16 juin 2024. Amir Levy/Getty Images

Netanyahu a qualifié le Hamas de « nouveaux nazis » et le président américain Joe Biden a déclaré que « l’ancienne haine des Juifs » entérinée par les nazis avait été « ramenée à la vie » le 7 octobre.

Les menaces extérieures qui pèsent sur leur pays ont unifié de nombreux Israéliens, mettant en veilleuse les querelles politiques internes qui divisaient la société depuis des mois. Pendant ce temps, les souffrances des Palestiniens ont été largement absentes des écrans de télévision israéliens, dominés par les nouvelles concernant les otages de Gaza.

Après les attaques du Hamas, les sondages ont montré que la plupart des Israéliens soutenaient la guerre à Gaza et ne voulaient pas que leur gouvernement arrête les combats, même en négociant la libération des otages kidnappés. À l’occasion du premier anniversaire de l’attaque du 7 octobre, un sondage publié par l’Institut israélien de la démocratie a révélé que seuls 6 % des Israéliens pensent que la guerre à Gaza devrait être arrêtée en raison du « coût élevé en vies humaines. »

Certains soldats, cependant, ne pouvaient rationaliser les horreurs qu’ils ont vues.

À son retour de Gaza, Mizrahi disait souvent à sa famille qu’il sentait un « sang invisible » sortir de lui, a déclaré sa mère.

Shir, sa sœur, accuse la guerre d’être à l’origine de la mort de son frère. « À cause de l’armée, à cause de cette guerre, mon frère n’est pas là », a-t-elle déclaré. « Il n’est peut-être pas mort d’une balle (de combat) ou d’une grenade, mais d’une balle invisible », a-t-elle ajouté, faisant référence à ses souffrances psychologiques.

*

Qu’est-ce que le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) ? Le SSPT est un trouble de la santé mentale causé par des événements très stressants, effrayants ou pénibles, selon le Service national de santé britannique. Une personne atteinte de SSPT revit souvent l’événement traumatique sous forme de cauchemars et de flashbacks, et peut éprouver des sentiments d’isolement, d’irritabilité et de culpabilité. Le SSPT peut se développer immédiatement après l’expérience d’un événement perturbant, ou se manifester des semaines, des mois, voire des années plus tard.

Source : CNN, Nadeen Ebrahim, Mike Schwartz, 21-10-2024

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

lundi 24 février 2025

Solo el 3% de los israelíes judíos cree que el plan de limpieza étnica de Trump para Gaza es inmoral

 FUENTE: https://rafaelpoch.com/2025/02/07/solo-el-3-de-los-israelies-judios-cree-que-el-plan-de-limpieza-etnica-de-trump-para-gaza-es-inmoral/

Autora: Caitlin Johnstone

Una encuesta del Jewish People Policy Institute ha revelado que «más de ocho de cada diez israelíes judíos apoyan el plan» propuesto por el presidente Donald Trump de limpiar étnicamente la Franja de Gaza de palestinos reasentándolos en Egipto y Jordania.

La encuesta también encontró que entre la minoría de israelíes que no apoyaban el plan de Trump, sólo el 13% se oponía porque lo consideraba inmoral. Entre los israelíes judíos específicamente, el número que se opone a la limpieza étnica de Gaza por razones morales es de solo el tres por ciento.

Un tres por ciento. Si eso no es un signo de una sociedad moralmente enferma, no sé qué lo sería.

Para que quede claro, estamos hablando de expulsar permanentemente a una población indígena de su tierra natal a escala masiva para que su territorio pueda ser reclamado por colonos. Este es el tipo de crimen que incluso una conciencia medianamente formada reconocería inmediatamente como profundamente inmoral, pero entre los judíos israelíes, esa cifra es sólo del tres por ciento.

La degeneración moral que hace posible tal falta de empatía humana básica a gran escala es la consecuencia natural de todo lo que el Estado de Israel es y siempre ha sido. A los judíos israelíes se les adoctrina desde que nacen para que consideren a los palestinos menos que humanos, porque de lo contrario el Israel moderno no tendría sentido. No tiene sentido que un Estado de apartheid en el que un grupo recibe un trato preferente sobre los demás se haya colocado encima de una civilización preexistente a la que se robó violentamente la tierra, los derechos y la dignidad, si se considera que todas las partes implicadas son iguales. Así que se les enseña a no verlas como iguales.

Sin embargo, este envenenamiento sistemático de la conciencia tiene repercusiones en todo tipo de ámbitos. Una encuesta de 2011 publicada por Haaretz reveló que el 61% de los hombres israelíes no considera violación el sexo forzado con un conocido, y que sólo el 7% cree que la violación marital es algo real. Las violaciones abundan en el ejército israelí y casi nunca se castigan; en 2022, The Jerusalem Post informó de que las FDI recibieron 1.542 denuncias de agresiones sexuales en el año 2020 y que, de ellas, sólo se presentaron 31 acusaciones.

Basta con escuchar a los israelíes hablar de valores exclusivos de su cultura como el «shitat hamatzliah» (pasar por encima de la gente y hacer lo que te dé la gana para ver si te sales con la tuya) o el pecado de ser un «freier» (alguien que se atiene a las normas y pierde la oportunidad de engañar a los demás) para comprender que ésta es una nación de sociópatas.

Y tiene que serlo. Si los israelíes fueran un pueblo profundamente moral con conciencias bien formadas, no existiría Israel, porque los abusos necesarios para mantener su existencia como Estado nunca contarían con el apoyo democrático de su pueblo. Israel no puede existir sin violencia, tiranía e injusticia incesantes, por lo que es vital para los intereses del Estado que los israelíes sean el tipo de personas que apoyarían estas cosas.

Y en caso de que alguien esté confundido, esta inmoralidad no se refiere en realidad a los judíos o al judaísmo. Cualquier grupo al que se adoctrine de forma generalizada en la creencia de que un grupo vecino debe ser tratado de forma abusiva se convertirá en personas crueles e ignorantes; cualquier persona con conciencia que haya interactuado alguna vez con sudafricanos blancos a partir de cierta edad probablemente haya probado esto. No tiene nada que ver con la religión o la etnia de nadie, es simplemente cómo se mantienen los abusos del apartheid.

Esta es la entidad depravada a la que se le dice a todo el mundo occidental que debe apoyar incondicionalmente. Un Estado de apartheid que convierte a su propia gente en monstruos para que participen en actos monstruosos.

(Publicado en : Only 3% Of Jewish Israelis Think Trump’s Ethnic Cleansing Plan For Gaza Is Immoral )

samedi 8 février 2025

Gallant confirme avoir émis la directive Hannibal pour tuer ses propres civils & soldats le 7 octobre

 Source: https://www.france-irak-actualite.com/2025/02/l-ancien-chef-de-guerre-israelien-confirme-avoir-emis-la-directive-hannibal-pour-tuer-ses-propres-civils-soldats-le-7-octobre.html?fbclid=IwY2xjawIUKCRleHRuA2FlbQIxMQABHY7xtTbVlPOwIEU7mf_LdQ0V--EU_KV2ja2hMRCTFmG9i3nCY_mgdKEPJw_aem_nl0mgOLPsN9jdW04oB6h2w&sfnsn=scwspmo

Par la rédaction de The Cradle  (7 février 2025)*

L'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant a reconnu avoir ordonné à l'armée d'appliquer la Directive Hannibal et tué des civils et soldats israéliens lors de l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Lors d'une interview accordée à Channel 12 en Israël le 7 février, M. Gallant a admis avoir ordonné le protocole controversé qui consiste à tuer les captifs en même temps que leurs ravisseurs.

Lorsqu'on lui a demandé si un ordre avait été donné pour mettre en œuvre la directive Hannibal, Gallant a répondu :

“Tactiquement, par endroits, l’ordre a été donné, et à d'autres, il ne l'a pas été, et c'est problématique”.

Israël affirme que le Hamas a tué environ 1 100 civils et soldats israéliens lors de son attaque contre les colonies et les bases militaires israéliennes le 7 octobre dans le cadre de l'opération “Al-Aqsa Flood”.

Cependant, les forces israéliennes ont tué un grand nombre de leurs propres civils et soldats au cours de l'attaque. L'armée a envoyé des hélicoptères d'attaque, des drones et des chars sur son propre territoire pour répondre à l'attaque, tuant non seulement des combattants du Hamas, mais aussi des civils et des soldats israéliens que les combattants palestiniens ont tenté de ramener en captivité à Gaza.

Des hélicoptères israéliens ont également tué des civils israéliens lors du festival Nova, qui se déroulait près de la base militaire de Re'im.

M. Gallant a également fustigé l'ancien ministre Sécurité de la police, Itamar Ben Gvir, pour sa prise d'assaut provocatrice de la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, déclarant que cela “a créé une situation explosive”.

M. Gallant a fait ces commentaires lors de sa première interview depuis qu'il a été démis de ses fonctions de ministre de la Défense en novembre.

L'ancien ministre de la Défense a déclaré que l'accord de cessez-le-feu actuel avec le Hamas à Gaza est presque identique à une proposition antérieure que le Hamas était prêt à accepter en mai de l'année dernière.

M. Gallant a accusé le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son cabinet d'avoir retardé l'accord de cessez-le-feu, ajoutant que s'il l'avait accepté à l'époque, Israël aurait pu ramener plus de prisonniers vivants tout en libérant moins de prisonniers politiques palestiniens, a déclaré M. Gallant.

Un grand nombre des 251 soldats et civils israéliens capturés avec succès par le Hamas ont ensuite été tués par des frappes aériennes israéliennes et des tirs amis de la part de soldats.

“Je considère que le gouvernement israélien n'a pas fait tout ce qu'il aurait pu entreprendre pour libérer les otages”, a déclaré M. Gallant.

En janvier, le général le plus haut gradé d'Israël, Herzi Halevi, a démissionné. Il a évoqué le “terrible échec” de la sécurité et du renseignement concernant l'attaque du Hamas.

La guerre qu'Israël a menée par la suite contre Gaza a tué au moins 47 000 Palestiniens, certaines estimations suggérant que le nombre de morts dépasse largement les 200 000.

*Source : The Cradle

Traduction: Spirit Of Free Speech

 

mardi 24 décembre 2024

Édition et presse. Gaza, symbole d’un tour de vis idéologique

https://orientxxi.info/magazine/edition-et-presse-gaza-symbole-d-un-tour-de-vis-ideologique,7866
 

Exclusif. Le jour de son arrivée en septembre aux éditions du Seuil, Coralie Piton, la patronne venue de McKinsey, voit d’un mauvais œil la sortie du Livre noir de Gaza, coordonné par Agnès Levallois. Et à Marianne, la directrice Natacha Polony, considérée comme critique de la guerre israélienne à Gaza, vient d’être débarquée. Signes de plus d’une menace sur les libertés éditoriales des milliardaires catholiques et réactionnaires. Et, bien entendu, pro-israéliens.

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C’est l’histoire d’une tentative d’effacement d’un livre, mais aussi le signe d’une défaite qui s’annonce si l’on n’y prend pas garde. À Paris, des manœuvres capitalistiques bouleversent l’édition et la presse depuis quelques années, qu’on pourrait résumer par « à droite toute ». Leitmotiv des patrons : que les universitaires, journalistes et éditeurs (évidemment woke) dégagent le terrain. Et arrêtent de bassiner avec la Palestine ces nouveaux amis d’Israël, au nom d’une tragique farce : la civilisation judéo-chrétienne qui se défendrait à Gaza.

Que les éditions du Seuil, place-forte littéraire de la gauche culturelle en France, soit le cadre de cet effacement en dit long sur les percées des nouveaux réacs sur le front des idées. Après avoir été la propriété de la famille Wertheimer, actionnaire de Chanel, plus encline aux garden-partys qu’aux joutes culturelles, cette maison est contrôlée depuis 2017 par la famille conservatrice franco-belge Montagne, qui possède les géants de la bande dessinée Dargaud et Dupuis, mais aussi Fleurus, l’hebdomadaire catholique Famille Chrétienne et quelques petits éditeurs traditionalistes.

Mai 2024. Hugues Jallon, PDG des éditions du Seuil, est débarqué. Les Montagne lui reprochent des résultats financiers en baisse et des erreurs de management. La baisse touche tout le secteur de l’édition qui s’est mal remis de la fin de l’engouement pour les livres pendant les années covid. Jallon a des convictions de gauche, qu’il n’a jamais cachées. Cela n’avait pas empêché son embauche en 2018 par les Montagne. Cet ancien patron de La Découverte, lui-même auteur, est un professionnel respecté. Mais depuis, les temps ont changé.

Parmi les projets lancés par Hugues Jallon avant son limogeage : Le livre noir de Gaza1. Il est confié à Agnès Levallois, une spécialiste du Proche-Orient, vice-présidente de l’Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (Iremmo) et enseignante à Sciences Po. L’objectif de l’ouvrage est simple : traduire en français et éclairer des rapports d’ONG sur la situation à Gaza depuis un an. La préface est confiée à Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières (MSF) et spectateur à la fois avisé et engagé.

Malgré le départ d’Hugues Jallon, le processus de fabrication du livre suit son cours. La date de sortie du Livre noir est fixée au 4 octobre 2024. Début juillet, Coralie Piton est nommée à la tête des éditions du Seuil. Ancienne de la Fnac et de Canal+, elle a commencé sa carrière comme consultante chez McKinsey, le cabinet de conseil préféré des ultralibéraux. Il aida notamment Emmanuel Macron dans sa première campagne présidentielle. Il en fut dûment récompensé par des commandes de ministères macronisés après 2017, comme le révéla la presse début 2022. Plusieurs enquêtes judiciaires sont en cours à ce sujet.

Le « resserrement » du débat d’idées

Une ancienne de McKinsey à la personnalité glacée, selon le mot d’une salariée, contre un rêveur de gauche un peu bordélique, « cela ne pouvait pas s’inventer, mais, pour beaucoup, on a compris que la messe était dite », confie un salarié du Seuil. Vincent Montagne, le patron de Média Participations, qui contrôle le Seuil, est à la manœuvre. Il préside également le Syndicat national de l’édition (SNE), et « ne jure que par les résultats », dit un proche. Il complète en parlant de sa méfiance pour « les extrêmes », comprenez de gauche.

Coralie Piton arrive au Seuil début septembre. Immédiatement, au cours de différentes réunions avec les équipes, elle fait part de ses « interrogations » et de son « embarras » quant à la sortie du Livre noir de Gaza. « Beaucoup de choses me gênent personnellement », dit-elle. Il semble que la préface de Rony Brauman soit « problématique » à ses yeux. « Pourtant, il ne s’agit pas d’un brûlot militant, mais d’un livre de documentation », déplore une salariée du Seuil. Il est trop tard pour censurer, « le livre est alors déjà dans les camions de livraison », ironise un troisième salarié. Il ajoute : « cela serait abusif de parler de censure, mais il s’agit d’un sérieux warning. L’inquiétude est moins sur ce livre que pour les projets qui vont suivre ». « Il s’agit d’une bêtise plus que d’une volonté politique », tempère une autre salariée.

L’histoire n’est alors pas rendue publique. En interne, beaucoup s’inquiètent désormais de la nomination d’une femme « qui ne connaît pas notre métier et se demande s’il faut soutenir un livre publié par la maison ». « Elle a compris qu’elle devait s’écraser, car le pôle commercial défendait le Livre noir », poursuit un salarié. D’ailleurs, pour protéger un lancement qui s’annonce prometteur, Agnès Levallois n’est pas mise au courant des « inquiétudes » de Coralie Piton par ses éditeurs. Elle va défendre le livre dans de nombreux médias et rencontres. Elle est « tombée de l’armoire » quand elle a appris ce qui s’était joué début septembre. Agnès Levallois souligne le soutien constant des équipes du Seuil à un ouvrage qui s’est très bien vendu depuis deux mois, témoin de l’intérêt du public pour Gaza, a contrario de la doxa ambiante.

Mais Agnès Levallois n’est pas totalement surprise. Elle constate le « resserrement » du débat d’idées en France. Le 7 novembre, elle devait participer à une rencontre sur le Liban, organisé par la vénérable Association Neuilly Liban en compagnie de Joseph Maïla, professeur à l’ESSEC, et Karim Emile Bitar, professeur à l’École normale supérieure (ENS). Cette réunion devait être présentée par le journaliste du Monde Benjamin Barthe dans une salle municipale de la ville, après accord du maire, Jean-Christophe Fromentin. Mais, face à une campagne locale de dénigrement et de menaces menée notamment par le Crif et le rabbin, Neuilly prend peur, ce qui est amusant à écrire, et ne veut plus prêter sa salle. La veille de sa tenue, la rencontre est annulée… Quant à Benjamin Barthe, il fait l’objet de campagnes diffamatoires depuis des mois, dont la très réactionnaire Eugénie Bastié se fait le relais dans un article du Figarovox le 17 décembre.

Cela marque un climat, tout comme la tentative maladroite d’envoyer un ouvrage aux oubliettes. Depuis la rentrée de septembre, on ne compte plus les réunions interdites par les préfets — celles de Salah Hammouri, l’auteur de Prisonnier de Jérusalem (édition Libertalia, 2023), en particulier. Partout, des pressions, des menaces, de la surveillance policière. Du 13 au 16 décembre, l’association Histoires de se rencontrer au cinéma organisait au Mas d’Azil, un superbe village d’Ariège à l’esprit rebelle et culturel, une rétrospective du cinéaste Eyal Sivan en présence de la philosophe Marie-José Mondzain et de l’auteur de ces lignes. Salle et rencontres pleines, de longs échanges d’idées et de perspectives dans une ambiance chaleureuse. Alentour, des gendarmes se tenaient en faction dans leurs breaks bleus, observant sans discrétion les participantes et relevant les plaques d’immatriculation des voitures pendant les séances.

Alliance entre ultra-laïcs islamophobes et riches réactionnaires catholiques

Accompagnant ce climat étouffant, se trame une alliance naissante entre les riches catholiques réacs — les familles Bolloré, Montagne, Stérin notamment — et les soutiens financiers de courants politiques ultra-laïcs et islamophobes, Daniel Kretinsky en particulier.

Ce milliardaire tchèque s’est bâti en France, en moins de dix ans, un empire économique et médiatique d’une puissance inédite, de l’énergie à la grande distribution. Il s’est allié à Denis Olivennes, son homme dans les médias. Ce dernier, aux commandes de nombreux magazines, dirige en coulisses Libération, à qui Kretinsky va à nouveau avancer 15 millions d’euros. Mais il est aussi le patron de Franc-Tireur, l’hebdo de Caroline Fourest et Raphaël Enthoven. On retrouvera les mêmes, et bien d’autres, à « Réels Tv », le projet de télé qu’Olivennes pilote et entend consacrer à la lutte contre « la désinformation ». Ce chaud partisan d’Israël, qui a commencé sa carrière politico-médiatique au Parti socialiste, a en horreur tout ce qui ressemble à un syndicaliste ou à un militant de gauche. Cela promet…

Entre la chorale de Denis Olivennes et les chœurs de Vincent Bolloré, c’est la même gamme qui est chantée, les mêmes obsessions racistes, la même vision biaisée de la France, tandis que la gauche a perdu la voix.

C’est encore brumeux, mais suffisamment précis pour déclencher divers levers de bouclier. D’abord quand tous ces gens se sont alliés au début de l’automne pour reprendre l’École supérieure de journalisme (ESJ-Paris). Puis fin novembre, à l’intérieur du groupe Bayard. Les salariées se sont mis en grève contre l’embauche à un poste dirigeant d’Alban du Rostu, l’ancien bras droit du « jeune » (50 ans) milliardaire Pierre-Édouard Stérin.

Les salariées de Bayard ont obtenu, le 2 décembre, le renoncement à son entrée dans leur groupe marqué par le christianisme social et la culture populaire. On peut se réjouir avec l’intersyndicale de Bayard (CFDT, CFTC, CFE-CGC-CSN, CGT, SNJ) d’une « victoire sur toute la ligne ». Mais Alban du Rostu est jeune, désormais connu, et il se dit qu’il échange avec Jordan Bardella. Il ne devrait pas connaître un long passage par la case chômage. D’autant qu’il est soutenu par Denis Olivennes.

Olivennes (qui est aussi un ami de Vincent Montagne du Seuil) aime bien être le nouvel ami d’Alban du Rostu. Dans un tweet, il le juge « sympa, pro, pas sectaire ». Il a essayé de fourguer à Stérin l’hebdomadaire Marianne, à la ligne politique erratique. Et il vient de débarquer sa directrice, Natacha Polony, ce 19 décembre. Polony disait partout dans Paris ces dernières semaines que ses ennuis ont commencé quand elle s’est affrontée à Bernard-Henri Lévy, dit BHL, le 24 mars 2024, sur le plateau de Léa Salamé, à propos de Gaza. Caroline Fourest, l’amie de Denis Olivennes et de BHL (Paris est un village), elle aussi très pro-israélienne, menait campagne contre Polony, qui l’avait virée de Marianne. L’extrême droite « pas sectaire » n’a pas réussi à récupérer l’hebdomadaire après un niet de la rédaction. Mais Olivennes veut venger l’affront à BHL, un autre de ses amis.

Tout en annonçant une sévère cure d’austérité pour Marianne, avec réduction de la rédaction et de la pagination, il nomme à sa tête un Bolloré-boy, le vieux roublard de la télé Frédéric Taddéi, qui était ces derniers temps à Europe 1. Il a aussi collaboré à Cnews, dont il a d’ailleurs été viré. L’homme traine la sulfureuse réputation d’aimer ouvrir ses micros à des complotistes et à des antisémites, comme Dieudonné ou Marc-Édouard Nabe. Mais, ce n’est pas forcément pour déplaire aux amis réactionnaires d’Olivennes, qui montre avec ce petit coup de force que ce déontologue autoproclamé assume aussi le tordu. Avec Taddeï à Marianne, ce titre tombe dans l’escarcelle des nouveaux réacs, sans dépenser un sou. Kretinsky reste propriétaire et Olivennes patron. Pauvres confrères, qui vont connaître des heures noires.

Une guerre idéologique

Côté réac encore plus engagé que Taddeï, Alban du Rostu est une des têtes pensantes de cette extrême droite identitaire. Il a conçu pour Stérin le projet Pericles, dévoilé cet été par l’Humanité. Il suffit de décliner l’acronyme Pericles — Patriotes, enracinés, résistants, identitaires, chrétiens, libéraux, européens, souverainistes — pour comprendre de quoi il s’agit : mettre le pays sous cloche identitaire, « remporter des victoires idéologiques », et se débarrasser de ces Français qui osent les mariages mixtes et manifestent pour la Palestine.

Ces gens sont des tyrans en mots. Pour le moment, ils s’affairent avec Jordan Bardella et Marine Le Pen. Mais leur projet de purification est terrifiant, et ils le préparent en se débarrassant de ces affreux « islamo-gauchistes » qui selon eux pullulent. Hugues Jallon est le premier d’une liste, Natacha Polony est une cousine éloignée, mais elle n’a pas manqué de courage sur Gaza. Le mot purification n’est pas trop fort : des listes de noms d’avocats et de journalistes à purger circulent déjà sur des sites identitaires.

Le redressement « spirituel » de la France qu’appelle de leurs vœux les catholiques réactionnaires et leurs alliés les libéraux islamophobes est ainsi en marche. Flics partout, libertés nulle part est moins un slogan libertaire qu’un programme politique. Un de leurs objectifs communs : ne plus entendre parler de cette sale guerre livrée à Gaza. Mais aussi de ces libertés qui s’éteignent l’une après l’autre au pays des droits de l’homme.

C’est une guerre idéologique qui se livre en France. Elle ne fait que commencer sur les fronts éditoriaux. Julia Cagé, experte des médias et présidente de la Société des lecteurs du Monde, constate, non sans inquiétude que « le laissez-faire face à Bolloré, pour piétiner l’idée de liberté éditoriale, dans les médias et l’édition, a été le libérateur de tout ». Des « pro-business semblant sans idéologie » s’alignent, un par un, derrière Bolloré et Bardella. Leurs partisans s’échinent à nous faire croire que la France est livrée, avec France Inter, Le Monde, Médiapart et bien d’autres titres, à la croisade woke (et pro-palestinienne), alors qu’en réalité ils mettent la main sur d’énormes pactoles médiatiques et éditoriaux. « Stérin se cache à peine », ajoute d’ailleurs Julia Cagé. Olivennes non plus. Inutile de continuer à s’aveugler : les nouveaux réacs sont en train de marquer de nombreux points.

mardi 17 décembre 2024

Avec l’aide des États-Unis, Israël exporte des instruments d’oppression à l’étranger et les teste contre les Palestiniens

 SOURCE: https://www.les-crises.fr/avec-l-aide-des-etats-unis-israel-exporte-des-instruments-d-oppression-a-l-etranger-et-les-teste-contre-les-palestiniens/


Entre 2018 et 2022, Israël s’est targué d’avoir le deuxième plus important budget militaire au monde par habitant, augmentant ses dépenses de 24 % en 2023. Le ministère de la Défense souligne que le secteur de la sécurité joue « un rôle monumental » dans l’économie, stimulant l’innovation industrielle et représentant environ 10 % des exportations nationales. Alors que Gaza brûle, les fabricants d’armes font état d’une « demande croissante » d’armes israéliennes « dans le monde entier ».

Source : Truthout, Ciudong Ng
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Un Palestinien dans une rue détruite par des bulldozers lors d’un raid israélien dans la ville de Jénine en Cisjordanie occupée, Palestine, le 1er septembre 2024. RONALDO SCHEMIDT / AFP via Getty Images

Alors qu’Israël renforce son blocus, les réserves médicales s’épuisent dans la bande de Gaza et les médecins sont confrontés à des patients souffrant de blessures inimaginables.

Le médecin orthopédiste Hani Bseso a opéré la jambe de sa nièce Ahed, après qu’un obus a traversé leur maison. Saignant abondamment, Ahed est restée dans un état d’hébétude atroce, tandis que ses proches la transportaient au rez-de-chaussée. Il était impossible de se rendre à l’hôpital. Bseso l’a donc amputée de la jambe sur la table de la cuisine où sa mère avait fait le pain le matin même.

Alors que le système de santé de Gaza implose, épidémies et famine se répandent comme une traînée de poudre. Après 25 ans, la polio y est revenue et les opérations israéliennes obligent les patients à évacuer l’hôpital des Martyrs d’Al-Aqsa, l’un des derniers établissements médicaux encore fonctionnel. Ailleurs, l’odeur des ordures non ramassées flotte dans l’air, et l’eau des égouts éventrés forme des mares qui reflètent la ligne d’horizon en train de se transformer en décombres. Cet été, des experts des Nations unies sont arrivés à la conclusion que la « campagne de famine intentionnelle et ciblée » menée par Israël était « une forme de violence génocidaire ». Seules les bombes et les balles pénètrent en abondance dans Gaza.

Il ne s’agit pas d’une simple coïncidence. Entre 2018 et 2022, Israël s’est targué d’avoir le deuxième plus important budget militaire au monde par habitant, augmentant ses dépenses de 24 % en 2023. Le ministère de la défense souligne que le secteur de la sécurité joue « un rôle monumental » dans l’économie, stimulant l’innovation industrielle et représentant environ 10 % des exportations nationales. Alors que Gaza brûle, les fabricants d’armes font état d’une « demande croissante » d’armes israéliennes « dans le monde entier ».

Concernant la guerre, Israël a adopté un modèle de militarisme bien ancré. Au cours des 50 dernières années, les dirigeants israéliens ont exploité les territoires occupés et l’assistance technique des États-Unis pour construire un imposant complexe militaro-industriel. Les victimes palestiniennes comme Ahed font partie de ce vaste mécanisme, dans la mesure où Israël exporte les technologies violentes et l’expertise qu’il perfectionne à Gaza vers des pays du monde entier.

Exportation de l’occupation

Pendant la guerre froide, grâce à la coopération militaire et technique des États-Unis, Israël est devenu le plus grand exportateur d’armes par habitant. Aux prises avec leur dette extérieure, les dirigeants israéliens ont encouragé les ventes d’armes afin d’atténuer les déséquilibres budgétaires et financer le développement industriel. Le secteur de la défense est devenu le fondement de l’économie, et les territoires occupés ont servi de laboratoire d’expérimentation à des fins meurtrières. « Aujourd’hui, on peut dire qu’aucun pays au monde n’est aussi dépendant des ventes d’armes qu’Israël », concluait le politologue Bishara Bahbah en 1986.

Les dictateurs d’Amérique latine, notamment le général Augusto Pinochet, sont devenus des clients enthousiastes. Après la guerre d’octobre 1973, des entreprises israéliennes ont envoyé des publicités à sa junte, et l’ambassade chilienne à Tel Aviv a rédigé des rapports sur les performances de leurs armes. Selon ces officiers, Israël était un modèle, laissant entendre que le régime militaire garantissait des « conditions de tranquillité » en Palestine. Au final, les dirigeants israéliens ont aidé le général Pinochet à développer l’industrie aérospatiale chilienne, allant jusqu’à transférer la technologie nécessaire à la production de bombes à fragmentation.

De plus en plus, les responsables américains ont encouragé Israël à étouffer les mouvements de gauche en armant des régimes autoritaires alignés sur Washington. Face à la législation sur les droits humains, le président Jimmy Carter et ses successeurs ont esquivé les restrictions imposées au pouvoir national en confiant la répression aux dirigeants israéliens. « Israël est l’entrepreneur du sale boulot », a déclaré le général Mattityahu Peled. « Israël agit en tant que complice et bras armé des États-Unis. »

En Amérique centrale, cette réalité s’est révélée de manière brutale. Avant sa chute en juillet 1979, le président nicaraguayen Anastasio Somoza Debayle s’est appuyé sur les livraisons d’armes israéliennes pour réprimer une révolution populaire. « Les rues de Managua ressemblent à celles de Jérusalem, observe El País. Le matériel israélien est omniprésent. Les Nicaraguayens ont affirmé que les forces de Somoza étaient « génocidaires » parce qu’elles rasaient des villages, massacraient des familles entières et violaient les femmes devant leurs maris.

Leurs fusils d’assaut Galil, de fabrication israélienne, sont devenus des symboles d’oppression. Lors de la libération de Managua, les rebelles sandinistes ont confisqué les armes, avant de vider les munitions en longues salves – comme si le pays était purgé du passé à chaque rafale. Craignant la propagation de la révolution, la CIA a alors encouragé les dirigeants israéliens à armer ce qui restait du régime Somoza, tout en isolant le gouvernement progressiste sandiniste. Tout au long des années 1980, Israël est resté un acteur majeur dans la région, fournissant des armes aux Contras nicaraguayens et exacerbant une guerre civile qui a fait 30 000 morts.

Mais c’est au Guatemala que l’empreinte israélienne a été la plus forte, le général Efraín Ríos Montt affirmant que son coup d’État de 1982 avait réussi en partie « parce que beaucoup de nos soldats avaient été entraînés par des Israéliens ». Au cours de l’année suivante, Ríos Montt a intensifié une guerre génocidaire contre les communautés indigènes, laquelle a fait plus de 200 000 victimes. Les officiers se sont inspirés de la stratégie israélienne pour poursuivre la « palestinisation » des zones rurales. À Dos Erres, les forces guatémaltèques ont arrosé les villageois de balles tirées par des fusils Galil, avant de fendre le crâne des survivants à l’aide de masses.

Les journalistes Andrew et Leslie Cockburn ont relevé que les dirigeants israéliens exprimaient peu de réticences quant aux ventes d’armes. « Je me fiche de ce que les Gentils font avec les armes », leur a répondu le lieutenant-colonel Amatzia Shuali en se moquant d’eux. « L’essentiel, c’est que les entreprises israéliennes « en profitent. »

Quand on en est arrivé à la fin de la guerre froide, l’aide financière et militaire des États-Unis avait permis à Israël de développer une formidable industrie d’armement. Dans son étude de référence, Bahbah a souligné qu’à certains moments, 40 % de la main-d’œuvre industrielle du pays travaillait dans le secteur de la défense, et que les exportations d’armes constituaient une source majeure de devises étrangères. La production d’armes a accéléré la dérive militariste, transformant l’occupation de la Palestine en une entreprise économiquement viable et lucrative. En somme, les dirigeants israéliens ont financé l’agression contre les Palestiniens en spoliant d’autres gens en Amérique latine et ailleurs.

Le choix de la terreur

Avec l’implosion de l’Union soviétique, Israël a redéfini le discours dominant justifiant son occupation militaire. Pendant des décennies, les officiers israéliens avaient prétendu que les combattants palestiniens et leurs alliés socialistes – comme les Sandinistes – étaient des « terroristes » en quête de vengeance, faisant fi de leurs griefs politiques et de leurs idéaux. Or, les dirigeants sionistes affirment aujourd’hui que le « terrorisme » constitue la plus grande menace pour la paix mondiale, tout en détournant ce terme élastiquepour diaboliser l’ensemble de la résistance palestinienne. En 1988, des officiers israéliens ont distribué des matraques, ordonnant aux troupes de briser les os des manifestants, qualifiant les manifestations populaires de terrorisme. En l’espace de deux ans, l’organisation à but non lucratif Save the Children, dont le siège est à Londres, a calculé que plus de 23 600 enfants palestiniens avaient dû recevoir des soins médicaux pour avoir été tabassés. Près d’un tiers des victimes avaient 10 ans ou moins.

C’est à ce moment-là que Benjamin Netanyahou s’est imposé comme un pyromane conservateur et un expert autoproclamé de la terreur mondiale, tout en dirigeant le Likoud. Auparavant, il avait fondé l’Institut Jonathan pour convaincre les décideurs politiques occidentaux que le « terrorisme international » constituait une menace existentielle pour la démocratie moderne, tout en qualifiant la résistance palestinienne de diabolique, irrationnelle et antisémite. Son programme politique mettait à l’honneur l’expansion coloniale et la force brute.

En octobre 1995, Netanyahou a condamné le Premier ministre Yitzhak Rabin pour avoir négocié les accords d’Oslo, suscitant des protestations virulentes et apparaissant lors d’un rassemblement avec une effigie de Rabin en uniforme SS nazi. Un mois plus tard, un tireur d’extrême droite assassinait le premier ministre.

Après les attentats du 11 septembre, Netanyahou et d’autres dirigeants israéliens ont mis à profit leur expertise en matière de contre-insurrection pour renforcer les relations avec Washington et donner forme à la « guerre mondiale contre le terrorisme ». De manière tout à fait opportune, de nombreux partisans de l’invasion de l’Irak étaient des sionistes purs et durs. Le vice-président Dick Cheney a été membre du conseil d’administration de l’Institut juif américain pour la sécurité nationale, lequel encourage les ventes d’armes à Israël. Auparavant, Dick Perlel, conseiller à la défense, était le porte parole des fabricants d’armes israéliens, et Douglas Feith, sous-secrétaire à la défense pour la politique était un conseiller de Netanyahou. Le Jerusalem Post a souligné que Paul Wolfowitz, l’un des principaux architectes de la guerre, était un « fervent pro-israélien » et l’a proclamé « homme de l’année » quelques mois après l’invasion.

Les responsables israéliens espéraient que l’intervention américaine renverserait les régimes hostiles et anéantirait les rêves d’autonomie des Palestiniens. À la veille de l’invasion de l’Irak, le quotidien Haaretz annonçait : « Les dirigeants militaires et politiques israéliens aspirent à la guerre. » Netanyahou lui-même a publié « The Case for Toppling Saddam » dans le Wall Street Journal (Plaidoyer pour le renversement de Saddam), reprenant les fausses affirmations sur l’existence d’un arsenal nucléaire irakien.

Alors que la guerre contre le terrorisme prenait de l’ampleur, les officiers américains et israéliens ont partagé des tactiques de contre-insurrection, tout en se côtoyant dans le désert du Néguev. « Des délégations militaires américaines de haut rang sont venues […] pour apprendre de l’expérience israélienne en matière de chasse aux terroristes dans la bande de Gaza », rapportent des experts en matière de défense. L’aide étrangère et les besoins en matière de services de sécurité ont également favorisé une sorte de start up du colonialisme, les vétérans israéliens ont en effet créé des entreprises telles que NSO Group et Smart Shooter, qui développent les plus récents logiciels espions et systèmes de visée des armes à feu – profitant de l’occupation pour mettre au point de nouvelles technologies de contrôle social.

L’ambassade des États-Unis a discrètement reconnu que le fait que le pays soit sur un pied de guerre a favorisé sa croissance économique. « Les programmes en matière de formation militaire d’Israël témoignent parfaitement du niveau d’investissement du gouvernement » se félicite l’ambassadeur James Cunningham. Les élèves ingénieurs de l’armée israélienne ont mis au point de « meilleurs systèmes de guidage des missiles », des « drones » et autres innovations létales. « À l’issue de leur service militaire, explique-t-il, les diplômés ont été instantanément recrutés par des entreprises technologiques » telles qu’Elbit Systems et Gilat Satellite Networks.

Les responsables américains ont présenté Israël comme un paradis pour les start-up, tout en excluant les victimes palestiniennes de son économie militarisée. En 2007, les diplomates américains ont exclu les dirigeants du Hamas des pourparlers de paix d’Annapolis, bien qu’ils aient reconnu sa « victoire aux élections locales de Gaza ». Après avoir passé au crible les délégués palestiniens, la secrétaire d’État Condoleezza Rice leur a carrément dit d’oublier le nettoyage ethnique des Palestiniens (la « Nakba ») qui avait eu lieu lors de la création d’Israël en 1948. « Des choses désagréables arrivent tout le temps à des gens partout dans le monde, les a admonestés Mme Rice. Vous devez vous tourner vers l’avenir ».

Au final, la guerre contre le terrorisme a légitimé la flambée de l’aide militaire et de la coopération tout en offrant un cadre idéologique qui a discrédité la dissidence palestinienne dès le départ. Pour les décideurs politiques, le concept de « terrorisme » a permis une inversion des vérités gênantes : la résistance des faibles est devenue « violence irrationnelle » et les revendications coloniales « autodéfense ». Riche de l’aide étrangère, l’économie israélienne s’est militarisée plus encore. Le « processus de paix » est devenu un outil d’agression, les États-Unis servant d’« avocat d’Israël », selon un négociateur américain.

Expérimentation de l’Armageddon

Alors que les négociations s’enlisaient, les représentants des gouvernements et des entreprises continuaient de miser sur « les avantages comparés » d’une guerre sans fin. Prétextant les attaques à la roquette du Hamas, Israël a lancé l’opération « Plomb durci » en décembre 2008, décrivant la bande de Gaza comme un « nid de terroristes ». Cette dernière est devenue un véritable laboratoire en matière d’armement, où les quartiers ont été réduits en ruines et où des colonnes de fumée épaisses envahissaient l’horizon. Les forces d’invasion y ont présenté de nouveaux équipements tels que le char Merkava IV et le fusil d’assaut Tavor TAR-21, et auraient testé l’explosif à métal dense et inerte, une arme expérimentale mise au point par l’armée de l’air américaine.

« Des maisons, des écoles, des centres médicaux et des bâtiments de l’ONU – autant de structures destinées aux civils – ont été directement touchés par l’artillerie israélienne », a souligné Amnesty International. Les soldats ont utilisé des « munitions de précision » jusque dans des chambres d’enfants. Des éléments de preuve indiquent également qu’ils ont testé « un nouveau type de missile » contre des civils, tuant des élèves qui attendaient un bus scolaire et une famille entière dans sa maison. Ils ont même bombardé des bâtiments de l’ONU avec du phosphore blanc. Des experts en droits humains ont trouvé des obus fabriqués à Pine Bluff, dans l’Arkansas, encore fumants trois semaines après le cessez-le-feu.

Et pourtant, la politique américaine a continué de se rallier à celle d’Israël. Quelques jours après le début de l’offensive, le Pentagone a prévu d’envoyer aux forces israéliennes des explosifs à hauteur de 500 0000 kilos, dont des bombes au phosphore blanc.

L’opération « Plomb durci » a peaufiné un schéma historiquement classique, Gaza servant de banc d’essai pour les armes israéliennes et américaines, tandis que les responsables américains justifiaient les opérations en parlant de « terroristes » anonymes.

Mais bien souvent les incursions violentes d’Israël n’étaient pas provoquées. En mars 2018, les Palestiniens ont organisé la Grande Marche du retour, un mouvement pacifique réclamant des droits politiques et civils. Les officiers israéliens ont répondu par une pluie de gaz lacrymogènes et de balles – tuant 214 civils et blessant plus de 36 100 autres. Le chef d’état-major Gadi Eisenkot a admis avoir autorisé les « tirs à balles réelles », expliquant : « Les ordres sont d’utiliser une force maximale. »

Des professionnels de la santé ont affirmé que des soldats avaient testé sur des manifestants des « balles papillon », armes illégales, qui ont pulvérisé des organes et contraint les médecins à amputer des membres. Al Jazeera a également rapporté que les forces israéliennes « ont expérimenté des méthodes de contrôle des foules », en utilisant des drones pour asperger des gaz lacrymogènes et des nuages chimiques qui ont amené les manifestants à « se débattre violemment » sur le sol.

Plutôt que de geler l’aide, l’administration Trump a fêté l’ouverture de l’ambassade américaine à Jérusalem, alors qu’Israël massacrait 58 Palestiniens. Les applaudissements de satisfaction n’ont fait que renforcer le cycle de l’impunité et de la victimisation. L’année suivante, les forces israéliennes ont intentionnellement rasé le Syndicat général des Palestiniens handicapés, éliminant ainsi tout service de santé destiné aux personnes amputées.

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À l’étranger, les offensives militaires sont restées des arguments de vente. Ironie du sort, les États arabes sont devenus les principaux clients. À la suite du printemps arabe, une relation symbiotique s’est instaurée : les États du Golfe ont importé des technologies de sécurité pour écraser la dissidence, et les entreprises israéliennes ont eu accès au plus grand marché d’exportation d’armes au monde. Verint Systems a expédié du matériel de surveillance à Bahreïn et le groupe NSO a vendu le logiciel espion Pegasus à l’Arabie saoudite, aidant ainsi les autorités à réprimer les militants des droits humains. En 2023, Elbit Systems a lancé des projets d’usines au Maroc, tandis que des drones israéliens sillonnaient le Sahara occidental et frappaient des civils sahraouis.

Le président Donald Trump a entériné ce changement en négociant les accords d’Abraham, qui ont normalisé les relations entre Israël, le Bahreïn et les Émirats arabes unis en septembre 2020. En l’espace de deux ans, les États arabes ont absorbé près de 25 % des exportations militaires israéliennes.

L’Union européenne aussi a fait appel à l’expertise israélienne relative aux questions de violence, tout en important du matériel de sécurité pour réprimer l’immigration. Dès 2017, les institutions israéliennes recevaient chaque année 170 millions d’euros de fonds de recherche de l’UE. En 2021, Israël a rejoint l’initiative Horizon Europe, ce qui a poussé le ministre des affaires étrangères, Yair Lapid, à proclamer que son pays était « un acteur central du plus grand et plus important programme [de recherche et développement] au monde ». Horizon finance le développement de technologies de surveillance et de renseignement, de techniques d’interrogatoire et d’autres projets à caractère clairement militaire. Les entreprises de défense Thales, Safran et MBDA ont établi des accords de partenariat avec des sociétés israéliennes pour fabriquer des armes, en particulier des drones. Les experts militaires israéliens Yaakov Katz et Amir Bohbot soulignent : « La bande de Gaza est l’épicentre de la révolution israélienne en matière de drones. »

Fidèle à une tradition historique, Israël s’est assuré des clients en refusant de respecter les droits humains ou les embargos sur les armes. Katz et Bohbot estiment que « ne pas imposer de conditions aux ventes d’armes » est « un principe clé », qui permet à une entreprise de devenir « un acteur dominant sur les marchés ». Plus de dix ans après Plomb durci, Gaza est resté le théâtre dévasté d’un laboratoire en matière d’armement. L’occupation militaire israélienne n’a pas seulement été une catastrophe humaine, elle a aussi constitué un produit d’exportation national : une marque à promouvoir.

Cumul par extermination

Le conflit en lui-même était pourtant le reflet d’une contradiction irrémédiable : Les armes israéliennes promettaient une domination totale, mais rendaient la résistance inévitable. Dès 2018, l’ONU a averti que le siège imposé par Israël faisait de Gaza une zone « invivable ». L’ambassade des États-Unis a confié que les forces d’occupation empêchaient parfois même l’entrée de « jouets d’enfants et de « fournitures scolaires ». Pour mettre à mal le statu quo, des combattants palestiniens ont attaqué Israël en octobre dernier, franchissant des frontières ceinturées de murs anti-explosion et d’équipements de surveillance de pointe, capturant plus de 240 personnes et portant un coup dur à l’image d’invincibilité du pays.

Leur opération a déclenché une réaction violente, le Premier ministre Netanyahou exploitant alors la guerre pour faire étalage des prouesses technologiques de son pays. Quelques jours après le début des combats, un porte-parole militaire a annoncé les débuts au combat du mortier « Iron Sting », tandis que la presse locale enregistrait de « fortes hausses du cours des actions » des fabricants d’armes et vantait les mérites du nouveau char Barak qui « fait ses preuves à Gaza »

Les dirigeants israéliens affirment avant tout que leurs technologies de pointe en matière d’intelligence artificielle permettent d’effectuer des frappes précises et humainement adaptées. Mais en privé, les officiers de renseignement nient que les Forces de défense israéliennes (FDI) fassent preuve de retenue. « Au contraire, les FDI bombardaient sans hésitation les maisons des combattants », se souvient l’un d’entre eux. « Il est beaucoup plus facile de bombarder la maison d’une famille. » Un autre officier admet que « nous avons bombardé uniquement pour la ‘dissuasion’» – en abattant des gratte-ciel « juste pour détruire ».

Les enquêteurs de l’ONU en sont arrivés à la conclusion que les dirigeants israéliens ont cherché à « exterminer » les Palestiniens, « en rasant des blocs résidentiels et des quartiers entiers », tout en obligeant plus de 1,7 million de victimes à quitter leur foyer. Les autorités décrivent des soldats abattant des réfugiés arborant des drapeaux, « saccageant les maisons » et utilisant « la famine comme arme de guerre ».

Leur violence est délibérément gratuite : en juillet dernier, Israël a frappé quatre écoles en quatre jours, envoyant des réfugiés voltiger dans les airs au milieu d’un déluge d’éclats d’obus et de feu. Au milieu des bombardements incessants, Human Rights Watch a récemment publié une étude démontrant que les soldats israéliens torturent systématiquement les prisonniers palestiniens, présentant des preuves de brûlures de cigarettes et de briquets, des marques de coups violents, d’électrocutions et d’« abus sexuels » – y est même relaté le récit de membres de Tsahal utilisant un fusil M 16 pour violer un détenu.

Les auteurs soulignent qu’Israël prend pour cible le corps médical, aggravant ainsi l’effondrement du système de santé de Gaza. Walid Khalili, ambulancier, a informé les enquêteurs que ses ravisseurs avaient suspendu des Palestiniens par leurs menottes, les accrochant par dizaines au plafond comme des fruits sanguinolents. Un médecin de Tsahal fait remarquer que de telles pratiques entravent très fréquemment la circulation sanguine, obligeant ses collègues à amputer les membres des prisonniers.

En dépit de ces violations des droits humains, l’administration Biden a approuvé en août un programme de 18 milliards de dollars pour des avions de combat et les fabricants d’armes israéliens sont optimistes. « C’est l’heure de gloire de l’industrie de la défense », insiste Michal Mor, PDG de Smart Shooter.

Depuis des décennies, la spoliation des Palestiniens alimente un cycle d’accumulation, dans la mesure où Israël construit non seulement des colonies, mais aussi des armes dans les territoires occupés. En fin de compte, l’aide américaine a contribué à transformer le pays en une techno-dystopie qui exporte des instruments d’oppression à l’étranger, tout en les testant sur les réfugiés le long de ses frontières mouvantes. À un niveau très préoccupant, la guerre génocidaire en cours traduit cette logique impitoyable en même temps qu’impersonnelle : Israël et les États-Unis plongent les Palestiniens dans la faim et la désolation, entamant la phase suivante de la spirale de l’accumulation par l’extermination..

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Ciudong Ng est historien, il est spécialisé dans le militarisme américain.

Source : Truthout, Ciudong Ng, 01-09-2024
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises