Le
fondement de la critique irréligieuse est : c'est l'homme qui fait la
religion, ce n'est pas la religion qui fait l'homme. Certes, la religion
est la conscience de soi et le sentiment de soi qu'a l'homme qui ne
s'est pas encore trouvé lui-même, ou bien s'est déjà reperdu. Mais
l'homme, ce n'est pas un être abstrait blotti quelque part hors du
monde. L'homme, c'est le monde de l'homme, l'État, la société. Cet État,
cette société produisent la religion, conscience inversée du monde,
parce qu'ils sont eux-mêmes un monde à l'envers. La religion est la
théorie générale de ce monde, sa somme encyclopédique, sa logique sous
forme populaire, son point d'honneur spiritualiste, son enthousiasme, sa
sanction morale, son complément solennel, sa consolation et sa
justification universelles. Elle est la réalisation fantastique de
l'être humain, parce que l'être humain ne possède pas de vraie réalité.
Lutter contre la religion c'est donc indirectement lutter contre ce
monde-là, dont la religion est l'arôme spirituel.
La détresse religieuse est, pour une part, l'expression de la détresse réelle et, pour une autre, la protestation contre la détresse réelle. La religion est le soupir de la créature opprimée, l'âme d'un monde sans cœur, comme elle est l'esprit de conditions sociales d'où l'esprit est exclu. Elle est l'opium du peuple. L'abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du peuple est l'exigence que formule son bonheur réel. Exiger qu'il renonce aux illusions sur sa situation c'est exiger qu'il renonce à une situation qui a besoin d'illusions. La critique de la religion est donc en germe la critique de cette vallée de larmes dont la religion est l'auréole.
Traduction de M. Simon-Aubier, 1971
Hélder Câmara
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Killers au service de l'hégémon:
Jean-Paul II (le pape précédent est mort subitement, au bout de 30 jours de pontificat...) rappelle avec force à Puebla au Mexique en 1979: « La présentation du Christ comme révolutionnaire, le subversif de Nazareth, n'est pas en accord avec la catéchèse de l'Eglise. »
La Congrégation pour la doctrine de la foi publia en 1984 l’« Instruction sur quelques aspects de la théologie de la libération », rédigée par le cardinal Ratzinger. Le document rend justice à l’expression et aux buts de la théologie de la libération, mais avertit les chrétiens d’un risque inhérent à une acceptation sans critique du marxisme comme un principe dominant de l’effort de réflexion théologique.